Ce que l'on appelle « l'Écriture » - ou la Bible - est l'ensemble des Écrits sacrés inspirés de la Première Alliance et de la Nouvelle Alliance de Dieu avec les hommes. En un seul ouvrage coexistent différents écrits très variés : récits des origines, textes législatifs, récits historiques, textes sapientiaux, prophétiques, poétiques, hagiographies, lettres. Leur rédaction s’est échelonnée sur plusieurs siècles.
La Bible se distingue des autres écrits saints par l'importance et le statut des événements historiques qu'elle rapporte : Dieu s’engage et intervient dans l’histoire et ainsi révèle qui il est, qui est l’homme et quelles relations peuvent se nouer entre les deux. On y découvre, à travers ces événements qui ont ponctué l'histoire d'Israël (Première Alliance, ou en langage chrétien "Ancien Testament) que ce n'est plus seulement l'homme qui cherche Dieu, mais Dieu lui-même qui cherche l'homme et fait alliance avec lui. Ainsi Dieu révèle-t-il son dessein bienveillant et se révèle-t-il comme un être personnel qui veut entrer en relation.
Dans les premiers siècles après Jésus-Christ, l’Église rassemble certains écrits qu’elle juge saints et inspirés, en les distinguant d’autres qu’elle juge 'apocryphes' (c’est-à-dire à l’origine douteuse, non inspirés et non fiables quant à la foi). À la fin du 1er siècle, le Judaïsme, en réaction au christianisme, a voulu fixer le canon (la liste officielle) des Saintes Écritures et n’a retenu que les livres écrits en hébreu ou araméen. Il a donc rejeté du canon les livres de l’Ancien Testament qui avaient été écrits en grec ou dont on ne conservait que le texte grec (qu’ils ont par conséquent appelés apocryphes et que les catholiques appellent deutérocanoniques). À la fin du III° siècle, plusieurs Conciles ajoutent un ensemble de 27 Livres aux Écritures Saintes d’Israël, définissant ainsi la Bible chrétienne telle que nous la connaissons aujourd’hui.
Mais l’Église, qui a rassemblé, canonisé et conservé la Parole de Dieu , au long des siècles, est aussi celle qui la transmet et la diffuse dans le monde entier. Ce processus de transmission (grâce à laquelle l’Église affirme avec toute son autorité magistérielle que ce livre, cet ensemble de livres, est la Parole de Dieu), s’appelle la Tradition. Cette Tradition est aussi indispensable pour discerner la beauté, la force et le sens profond de l’Écriture. L’échange entre Philippe et l’Ethiopien, rapporté dans les Actes des Apôtres, illustre cette nécessité:
[Un Ethiopien qui était venu en pèlerinage à Jérusalem, s'en retournait, assis sur son char, en lisant le prophète Isaïe. Philippe l’entendit et lui demanda]:
« - "Comprends-tu donc ce que tu lis ?"
- "Et comment le pourrais-je, lui répondit-il, si personne ne me guide ?» (Ac 8,30-31)
Si personne ne nous guide, comment pourrions-nous comprendre l’Écriture ? Comme les disciples d’Emmaüs, nous avons besoin, pour que nos yeux s’ouvrent sur le mystère du Christ qui est au centre de l’Ecriture , de l’enseignement de l’Église, de sa liturgie, des Pères, des Docteurs et des Saints qui ont scruté la Parole de Dieu pour discerner avec l’aide de l’Esprit Saint la beauté, la force et le sens authentique de la Bible.
Ainsi, nous pouvons comprendre que les événements historiques de la Première Alliance sont également figures[1] de ceux de la Nouvelle... Les événements passés, les personnages de la Bible, les interventions de Dieu dans l’histoire sont aussi des anticipations, des préfigurations de ce qui doit arriver dans l’avenir. Cette lecture de l’Écriture s’appelle la typologie : les préfigurations sont des types de ce qui sera accompli dans le Christ et l’Église (désignés comme antitypes).
En outre, l’Écriture sainte doit être lue dans la Tradition et en laissant résonner toute l’Écriture. L’exégèse biblique comprend différentes méthodes, dont des méthodes d’interprétation, d’herméneutique biblique, qui étaient déjà inscrits dans le judaïsme, et qui ont été repris dans l’herméneutique chrétienne. Dans le judaïsme, on distingue ainsi quatre ’lectures’ possibles des textes : Peshat (sens évident, littéral), Remez (l’allusion), Drash (le sens indirect) et Sod (le sens secret). Les quatre lettres initiales de ces quatre mots forment un acrostiche 'PRDS' ('PaRDèS', qui signifie en hébreu : Paradis). Ce quadruple niveau d’interprétation se retrouve dans l'exégèse chrétienne, dès le IIIès avec Origène et tout au long du Moyen Age: on parle ainsi de lecture littérale (ou historique), allégorique, tropologique et anagogique.
Augustin de Dacie, dominicain du XIIIès, résumait ainsi ces quatre sens :
‘La lettre enseigne les événements, l’allégorie, ce que tu as à croire,
Le [sens] moral ce que tu dois faire, l’anagogie ce à quoi tu aspires’
Si cette doctrine des quatre sens de l’Écriture a été abandonnée au fil du temps, des théologiens -comme le cardinal Urs von Balthasar- l’ont réintégrée dans le champ de l’exégèse biblique. Celui-ci écrivait en effet en 1970 :
« Les quatre sens de l’Écriture célèbrent leur résurrection cachée dans la théologie d'aujourd’hui : en effet le sens littéral apparaît comme celui qu’il faut faire émerger en tant qu’historico-critique ; le sens spirituel en tant que kérygmatique, le sens tropologique en tant qu’essentiel et le sens anagogique en tant qu’eschatologique ».
Quelques exemples nous introduisent à ces dimensions. Lorsque sur la Croix, Saint Jean rapporte que : « l'un des soldats, de sa lance, lui perça le côté et il sortit aussitôt du sang et de l'eau » (Jn 19,34), les Pères de l’Église nous disent que le sang et l’eau figurent les sacrements de l'Église, et finalement l'Église elle-même, Épouse du Christ, qui est née du côté du Nouvel Adam plongé dans le sommeil de la mort, comme aux origines Ève était née du côté d’Adam, plongé dans un sommeil mystérieux.
De même, en ce qui concerne l’accomplissement des annonces de l’Ancien Testament, on constate que dans les temps qui ont immédiatement précédé l'Incarnation, l’attente du Messie était plus forte que jamais, puisque les historiens ont dénombré plus de 100 candidats-Messie au 1er siècle av. J.-C. L’accomplissement par Jésus de l’ensemble des annonces symboliques et prophétiques qui ont été données durant les siècles de la Première Alliance, au long de l’histoire d’Israël, constitue donc une réalité vraiment étonnante et unique au monde. Il faut alors apprendre à lire l'Ecriture comme elle a été écrite, avec l'Église, dans l'Esprit Saint !
Entrons donc dans le monde de la Bible.
Équipe de MDN