La bibliographie montre que cet axe de recherche est développé uniquement en Italie [1]. Ce sujet est très actuel car le défi aujourd’hui n’est pas seulement la globalisation mais l’unité de l’humanité.
Nous pouvons partir de la prophétie de Caïphe :
« Caïphe, étant grand prêtre cette année-là, […] prophétisa que Jésus allait mourir pour la nation -- et non pas pour la nation seulement, mais encore afin de rassembler dans l’unité les enfants de Dieu dispersés. »
(Jn 11, 47-52)
Jésus a réalisé l’attente de l’Ancien Testament mais d’une manière surprenante, différente de ce à quoi pensaient ses contemporains.
Selon la doctrine de l’Ancien Testament,
Les Fils de Dieu sont tous les membres du peuple d’Israël, ceux qui vivent de l’Alliance avec Dieu (Os 11,1 ; Ez 16,20 ; Is 43,6 ; Sg 9,4.7).
Les dispersés sont les exilés. La dispersion de l’exil fut interprété comme la sanction de l’infidélité du peuple. Au contraire, leur rassemblement est une résurrection [2].
Par le serviteur souffrant le Seigneur rassemble son peuple, en le reconduisant de l’exil à la terre promise (Is 49,5-6), il conclut avec eux une alliance nouvelle, et non seulement avec eux mais avec aussi avec tous les autres peuples que le Seigneur agrège à la nation élue.
Dans le cadre de cette restauration grandiose post-exilique, Jérusalem et le temple acquièrent un relief singulier. Ils deviennent le centre idéal où sont rassemblés les fils de Dieu, c’est-à-dire les juifs rescapés des pays d’exil et les Gentils qui leurs sont incorporés [3]. Juifs et Gentils sont réunis dans un même Sanctuaire, pour adorer le seul et même Seigneur [4]. Jérusalem est salué comme Mère de ces fils innombrables que le Seigneur a acheminé vers son sein, et qui connaît maintenant le bonheur et la surprise d’une maternité prodigieuse et universelle.
Quand saint Jean raconta l’entrée de Jésus à Jérusalem, il cite Za 9,9: "Ne craint pas, Sion! Voici ton roi qui vient, assis sur un poulain d’ânesse". Ce passage appartient au nombre des oracles sur les dispersés. Et sera compris par les disciples après Pâques (Jn 12,14-16).
Selon saint Jean,
Les fils de Dieu sont toute l’humanité, tous sont appelés à accueillir le Christ et sa parole (Jn1, 12 ; 1Jn 3,1.2.9.10 ; 5,1.2)
Les dispersés sont tous les hommes, victimes du « loup », c’est-à-dire du Malin qui « s’en empare et les disperse » (Jn 10,12) ; quand Jésus est abandonné des siens, alors « Voici venir l’heure -- et elle est venue -- où vous serez dispersés chacun de votre côté » (Jn 16,32). Leur dispersion sera recomposée dans l’unité même du Père et du Fils 11,52 ; cfr 10,30, mystère de l’alliance divine avec l’homme qui deviendra manifeste dans le jour dans lequel Jésus passe de ce monde au Père.
Le serviteur souffrant est le Christ, Agneau de Dieu (Jn 1,29.36) qui rassemble l’humanité dispersée.
Le temple de Jérusalem est la personne du Christ ressuscité (Jn 2,19-22), il attire et rassemble. « et moi, une fois élevé de terre, j’attirerai tous les hommes à moi. » (Jean 12,32), une unité qui s’épanouit dans la Trinité (Jn 10,30 ; 17,22-23). Les fils de Dieu dispersés sont rassemblés dans le Christ-temple.
Marie qui se tient debout au pied de la croix est associée à cette œuvre de rassemblement. Si Jésus avait voulu simplement se préoccuper de l’avenir de Marie, il aurait été suffisant de dire au disciple: « Voici ta mère ». En se tournant d’abord vers sa mère, Jésus souligne la mission qu’il va lui laisser. Marie est la mère de Jésus, la mère de tous les disciples de Jésus (Jn 19,25-27), la nouvelle Jérusalem, mère universelle de tous les hommes, de tous les fils de Dieu dispersés, rassemblés dans le Christ-temple (Jn 19,25-27).
Notes :
[1] Daminao MAZZOTTO, L'Unità degli uomini nel Vangelo di Giovanni ; Brescia 1977
Lucio GILIA, La morte di Gesù e l'unità degli uomini (Gv 11,47-53 ; 12,32) ; Bologna 1992
Elena BOSETTI, Il pastore, Cristo e la Chiesa neall Prima lettera di Pietro, Bologna 1990
[2] Dt 4,25-27 ; 28,62-66 ; 30,1-4
[3] Ez 37,21.26-28 ; 40-47 ; Tb 13,11 ; 14,5 ; 2Mac 1,27-29 ; 2,7-8.17-18 ; 3,43.58.59 ; Ecc 36,13-16 ; Is 56,6-7 ; 66,18-21 ; Zc 2,15 ; Tb 14,6-7
[4] Is 60,1-9 ; 49,19-20 ; Tb 13,12-13 ; Ps 87... Is 49,18-23 ; 54,1-3 ; 60,1-22 ; 66,7-13 ; Bar 4,36-37 ; 5,5-6...
Bibliographie :
A.SERRA, Contribuiti dell’antica letteratura giudaica per l’esegesi di Jn 2,1-12 e 19,25-27, ed. Herder, Roma 1977, pp 303-429.
A.SERRA, Maria a Cana e presso la Croce. Saggio di mariologia Giovannea (Jn 2,1-12 e 19,25-27) Centro di Cultura Mariana Mater Ecclesiae, Roma (via del corso, 306), 1991, pp. 94-103.
A.SERRA, Segno operante di unità dei dispersi figli di Dio (Jn 11,52), in E c’Era la Madre di Gesù (Jn 2,1). Saggi di esegesi biblico-mariana (1978-1988), ed. Cens Marianum, Milano-Roma 1989, pp. 285-321.
Le DEAULT R., Aspects de l’intercession dans le Judaïsme ancien, in Journal for the study of judaism,1 (1970), p.33-57.
F. BREYNAERT, A l’écoute de Marie, tome II,
préface Mgr Rey, Brive 2007 (diffusion Mediapaul), p. 69-75