C'est à bon droit qu'on peut affirmer l'harmonie entre la paternité humaine de Joseph et la paternité éternelle du Père : « C'est dans l'intimité familière de sa relation filiale à Joseph que Jésus apprit à dire : "Abba ! Père !", avant d'expliciter sa relation à Dieu avec la même expression. » (1)
La mission de Joseph est d'être un juste, afin de créer pour Jésus et Marie une atmosphère spirituelle qui permette à leur âme de s'ébattre librement dans les profondeurs de la foi. C'est là la caractéristique première d'un foyer chrétien. La justice est en effet la qualité fondamentale que Matthieu met en avant pour décrire l'âme de Joseph : il était un « homme juste » (Mt 1, 19). La justice est la qualité religieuse qui rassemble toutes les autres, comme l'affirme le prophète Habacuc : « le juste vivra par la foi » (Ha 2, 4).
Selon le même prophète, l'impie est celui « dont l'âme n'est pas droite », et dont les appétits immodérés de richesse sont la cause de sa perte (Ha 2, 4-5). Pour Habacuc, c'est la rectitude morale qui qualifie le juste, l'incite à la modération de ses désirs terrestres. Cette définition du juste éclaire très opportunément la spiritualité de Joseph, l'humble charpentier de Nazareth. L'humble condition sociale de Joseph est la norme pour une vie équilibrée. Dieu a choisi pour son Fils ce milieu modeste, afin de faire comprendre aux croyants les dangers d'une recherche effrénée des biens matériels. Durant sa vie publique, Jésus prêchera même détachement envers les richesses : « La vie n'est-elle pas plus que la nourriture, et le corps plus que le vêtement ? » (Mt 6, 25). Joseph est donc ce juste selon le cœur de Dieu, un modèle de sainteté préposé à la garde du Verbe de Dieu.
On devine l'amour incroyable qui unissait Joseph et Jésus à travers certains propos du Christ envers son Père céleste : « Le Père aime le Fils, et il lui montre tout ce qu'il fait » (Jn 5, 20). Ce partage des secrets entre le Père et le Fils nous dit quelque chose de la communication de la sagesse Joseph à Jésus. L'amour est son motif et sa dynamique !
Lorsqu'à douze ans Jésus disparaît pendant trois jours dans le Temple de Jérusalem, il accomplit le dépassement de l'autorité de Joseph, mais sans néanmoins la remettre en cause : « Il redescendit alors avec eux et revint à Nazareth ; et il leur était soumis » (Lc 2, 51).
Joseph poursuivra sa mission paternelle à Nazareth, et finira par se retirer, afin de laisser toute l'autorité paternelle au Père céleste.
(1) P. Grelot, « Saint Joseph », in Dictionnaire de Spiritualité, Paris 1974, col 1294
Philippe Plet, Saint Joseph et la spiritualité des élus dans l'Apocalypse, p.227-228