L'Ordre du Carmel est né dans le secret, dans le mystère.
L'Ordre du Carmel est né dans le silence et la solitude de quelques pauvres ermitages aménagés sur le promontoire du Mont Carmel, au tournant des XII° et XIII° siècles, quand quelques Européens, des « Croisés », s'étaient réunis dans le souvenir du saint prophète Elie.
Ils vivaient dans des cellules séparées, dans la dépendance de Jésus-Christ, méditant jour et nuit la Parole de Dieu.
Au temps du prophète Elie, une longue sécheresse avait desséché le pays. Elie adora et supplia. Une petite nuée se leva au loin, et vit au loin, prit de l'ampleur et provoqua une pluie généreuse sur le pays.
La tradition du Carmel voit dans cette nuée une annonce voilée de la Vierge Marie qui apporte la bénédiction. Et les premiers ermites se retrouvaient pour célébrer la messe dans une modeste chapelle dédiée à Marie, la Dame du lieu.
Parfois, mais rarement, lorsqu'ils se proposaient d'aider leurs proches, sans du tout se desservir eux-mêmes, ces ermites descendaient de l'ermitage et semaient abondamment ce qu'ils avaient contemplé.
Depuis sa toute première origine, le Carmel est donc fondé sur le Christ seul, sur l'intercession maternelle de Marie mais sans la moindre garantie humaine, mondaine
Avec la chute du royaume latin de Jérusalem et l'échec des croisades, ces ermites durent reprendre la mer, revenir dans leur pays d'origine, et s'installer dans les grandes villes d'Europe médiévale. Ils entraient alors dans le vaste mouvement des Ordres mendiants, aux côtés des fils de saint Dominique et de saint François[1].
Ils n'avaient pas de fondateur connu ni de règle antique qui auraient pu leur servir de recommandation indiscutable. Ils passaient du désert à la vie conventuelle dans les grandes villes universitaires. De plus, les décisions pontificales visaient à réduire le nombre de « communautés nouvelles » de l'époque.
Il ne leur restait que Marie. Elle ne pouvait pas les abandonner. C'est dans ce contexte qu'advint la vision de saint Simon Stock, puis la vision à Jacques Duèse qui deviendra le pape Jean XXII. Ces deux visions se résument en ces termes : le scapulaire est donné à l'Ordre du Carmel pour le salut éternel de ses enfants[2].
Aux Carmes lui demandant de les aider dans leurs difficultés institutionnelles, la Vierge répond par une promesse portant sur la seule chose qui compte vraiment : le salut éternel.
Dès lors, les carmes se consacrent à Dieu par Marie, c'est ce que manifeste le chapitre de Montpellier tenu en 1287:
"Nous implorons l'intercession de la glorieuse Vierge Marie, Mère de Dieu, à la suite et en l'honneur de laquelle a été fondée notre religion du Mont-Carmel"[3].
Cette attitude aura une conséquence logique dans la formule de la profession qui inclura la mention explicite de la Vierge Marie.
[1] Cf. Fr. Philippe de Jésus-Marie, o.c.d., Le secret du Carmel, le scapulaire et la vie mariale, Editions du Carmel, Toulouse 2010, p. 5-7
[2] Cf. Fr. Philippe de Jésus-Marie, Ibid., p. 8-22
[3] Acta del Capitolo Generale de Montpellier, Acta cap.gen., Ed. Wessels-Zimmermann, Roma 1912, p.7
Françoise Breynaert