Jean Paul II n'est jamais entré dans la perspective religieuse messianique caractéristique d'une partie du mouvement sioniste[1].
C'est pourquoi lors de leur rencontre le 13 avril 1986, le grand Rabin de Rome Elia TOAFF répondit à Jean Paul II en soulignant la différence entre sa vision et la vision catholique :
« La possession de la terre promise s'obtient comme récompense pour avoir suivi les voies du Seigneur et la fin des jours viendra lorsque le peuple juif y sera retourné. Ce retour est en train de se vérifier : les rescapés des camps d'extermination nazis ont trouvé en terre d'Israël un refuge et une nouvelle vie dans la liberté et dans la dignité reconquise. Pour cela, leur retour a été appelé par nos Maîtres "le début de l'avènement de la rédemption finale"... prélude à une ère de fraternité universelle.
[...] Lors de son allocution, le pape n'a jamais fait référence aux expressions du grand rabbin concernant le sens rédemptionnel du retour du peuple israélite en Terre d'Israël.
De son côté, la commission de la Curie romaine pour les relations religieuses avec le judaïsme, et son document Juifs et judaïsme dans la prédication et dans la catéchèse de l'Église Catholique a fait la déclaration suivante :
"L'existence de l'État d'Israël et ses choix politiques sont envisagés dans une optique qui n'est pas elle-même religieuse, mais qui se réfère aux principes du droit international" (24 juin 1985).
Ce n'est pas ainsi que la grande majorité du judaïsme envisage les choses. »[2]
[1] La position de Jean Paul II n'a rien d'étrange. Dans la foi chrétienne, le thème de la « terre » change de dimension : Abraham reçoit la promesse d'hériter non pas seulement Canaan, mais « le monde » (Rm 4, 13). De plus, Jésus est aussi le Nouveau temple, ou le propitiatoire. Luc 13, 35 et Rm 11, 15, qui évoquent la possibilité d'une adhésion au Christ du peuple juif ne parlent cependant pas d'une restauration politique de Jérusalem dans le cours ordinaire de l'histoire, mais plutôt à la Parousie. Cf. Quelques articles donnés en approfondissement.
[2] Allocution du grand Rabbin de Rome Elia Toaff à Jean Paul II, 13 avril 1986 -