Jean est très exact sur le plan historique.
Quand il cite la parole des juifs « Voilà quarante-six ans qu’on bâtit ce Sanctuaire » (Jn 2,20), c’est bien en 28 qu’il faut situer cette intervention. Sa topographie est aussi irréprochable. Il dit lui aussi qu’il est témoin oculaire : « Celui qui a vu rend témoignage, et celui-là sait qu’il dit vrai » (Jn 19,35).
Il insiste dans ses Épitres comme dans son Évangile : « Ce que nous avons entendu, ce que nous avons vu de nos yeux, ce que nous avons contemplé, ce que nos mains ont touché de la Parole de vie » (1 Jn 1,1). Il combat fortement « les menteurs » (1 Jn 2,22) et son arme contre eux est de dire : « nous avons vu ». Comment supposer que l’écrit ait pu avoir un effet quelconque sur ses premiers lecteurs et ait pu être recopié pour les générations suivantes s’ils pouvaient douter que l’auteur ait bien « touché de ses mains » celui qu’il appelle « la Parole de vie » ?
La rédaction finale et la publication de l’Évangile de Jean est tardive, comme le précise Saint Irénée formé par Polycarpe qui a personnellement connu Jean, mais les paroles qu’il écrit et publie sur la fin de sa vie étaient déjà « fixes et stables » dans son enseignement.
Un certain nombre de paroles prouvent cette rédaction finale tardive :
Jean a longuement médité l’enseignement de Jésus. Il sait qu’au moment où celui-ci parlait, les disciples ne pouvaient pas en comprendre tout le sens : « J’ai encore beaucoup à vous dire, mais vous ne pouvez pas le porter. Mais quand il viendra, lui, l’Esprit de vérité, il vous introduira dans la vérité toute entière … et il vous dévoilera les choses à venir » (Jn 16,12). Jean est conscient d’avoir été instruit par l’Esprit de vérité. Il ne s’agit pas d’une vérité nouvelle, mais d’une compréhension plénière de la vérité : « C’est de mon bien qu’il recevra, et il vous le dévoilera » (Jn 16,14) ; « Le Paraclet, l’Esprit Saint, que le Père enverra en mon nom, lui vous enseignera tout et vous rappellera tout ce que je vous ai dit » (Jn 14,26).
Dans l’Évangile de Jean le langage de Jésus est différent de celui des Évangiles Synoptiques, parce qu’il développe un enseignement plus profond, qui correspond à ce que Jésus révélait en particulier à ses disciples, et parce qu’il en révèle le sens profond.
Cet Évangile ne sera publié par l’Apôtre Jean qu’au soir de sa vie, à Éphèse, après la vision de l’Apocalypse, mais les paroles qu’il contient étaient « déjà toutes fixées » depuis longtemps comme l’explique Saint Épiphane vers 370 :
« Jean, alors qu'il avait déjà plus de 90 ans, après être revenu de l'île de Patmos, fut poussé par l'Esprit à mettre par écrit son Évangile. Mais les paroles qu'il y a mises étaient déjà stables et constituées. » (Saint Épiphane, Contre les hérétiques, livre de tome un H. E. 51-434)
Par ailleurs, toute la tradition de toutes les Églises apostoliques assure qu’il n’y a qu’un seul Jean, Évangéliste, disciple bien aimé du Seigneur et auteur des lettres de Jean et de l’Apocalypse. Les exégètes modernes qui ne s’attachent qu’au texte passent à côté du sens universel que Jean a voulu donner à sa place de disciple au pied de la Croix, et en ce qui concerne l’attribution à Jean de l’Apocalypse la Tradition des pères (Justin, Irénée, Jérôme, Clément, etc.), de l’Église locale à Patmos et de toutes les Églises apostoliques est absolument unanime et les petites discussions qui ont pu exister à ce sujet au IV° siècle ont été closes par le Concile de Tolède qui conclut en 633 :
« L’autorité de beaucoup de conciles et les décrets synodiques des saints évêques romains établissent que le livre de l’Apocalypse est de Jean l’Évangéliste et statuent qu’il doit être rangé au nombre des divins Livres. Or, il en est beaucoup qui ne reçoivent pas son autorité et refusent de la proclamer dans l’Église de Dieu. Si quelqu’un désormais ne la reçoit pas et ne la reconnaît pas publiquement dans l’Église au temps des messes entre Pâques et Pentecôte, il sera frappé d’une sentence d’excommunication. » (Concile de Tolède (633) ch 17, DzS 486)
Il reste cependant à comprendre et à donner une justification convaincante du décalage de ton qui existe dans les paroles de Jésus entre l’Évangile de Jean et les 3 synoptiques de Matthieu, Marc et Luc.