Un équivalent pratique de la règle d'or qui se trouve dans la Bible.
« - Dans les lois de Manu, (vers 200-100 avant J.-C.), on trouve un équivalent pratique de la règle d'or (qui se trouve dans la Bible, dès l'Ancien Testament)[1] :
"Je te dirai ce qu'est l'essence du plus grand bien de l'être humain. L'homme qui pratique la religion (dharma) de la non-nuisance (ahims?) universelle, acquiert le plus grand Bien.
Cet homme qui se maîtrise dans les trois passions, la convoitise, la colère et l'avarice, y renonçant par rapport aux êtres, acquiert le succès. [...]
Cet homme qui considère toutes les créatures comme son 'soi-même' et les traite comme son propre 'soi', déposant la verge punitive et dominant complètement sa colère, celui-là s'assurera l'obtention du bonheur. [...]
On ne fera pas à autrui ce que l'on considère comme nuisible pour soi-même. C'est en bref, la règle de la vertu. [...]
Dans le fait de refuser et de donner, dans l'abondance et le malheur, dans l'agréable et le désagréable, on jugera de toutes les conséquences en considérant son propre 'soi'".[2].
- Et plusieurs préceptes de la tradition hindoue peuvent être mis en parallèle avec les exigences du Décalogue[3].»[4]
Cependant, cet accord avec la Bible sur la qualité morale de certains comportements coexiste avec une grande différence dans les théories explicatives[5].
- Pour les Hindous, la doctrine de la loi naturelle repose la vision d'un cosmos panthéiste et immanent. Pour les chrétiens, elle se réfère au Créateur. Pour un chrétien, la loi naturelle est donc à la fois immanente et transcendante (et non pas uniquement immanente), en conséquence, un chrétien non seulement écoute son cœur mais aussi il forme sa conscience à la lumière de la révélation.
- « L'enseignement moral de l'hindouisme se comprend à la lumière des doctrines fondamentales des Upanishads : la croyance en un cycle indéfini de transmigrations (sams?ra), avec l'idée selon laquelle les actions bonnes ou mauvaises commises pendant la vie présente (karman) ont une influence sur les renaissances successives »[6].
Ces doctrines sont en contradiction avec la révélation biblique concernant l'union du corps et de l'âme et concernant la mort, le jugement et la Résurrection.
Un petit témoignage récemment vécu nous aidera à sentir la différence éthique :
Le jeune Verlinde fut témoin de l'indifférence totale d'une foule de pèlerin laissant au sol un homme agoniser seul[7] ; Mère Térésa [qui soignait les pauvres des bidonvilles de Calcutta] « eut à souffrir de la réprobation de certaines autorités religieuses lui reprochant de s'opposer à la loi karmique et de menacer ainsi l'équilibre du Dharma. »[8] ; Verlinde entendit aussi un gourou parler à une jeune fille participant aux sessions de méditation et lui déconseiller de faire des études d'infirmière : « Surtout pas ! La fréquentation des malades ferait baisser votre taux vibratoire ! »[9]
Conclusion.
Ainsi, la perspective hindoue (moniste, panthéiste, émanatiste), qui s'est peut-être développée comme une réponse à la souffrance (perdre le « je » dans le « Soi cosmique », c'est aussi perdre le « je qui souffre »), et comme une réponse au mal (« je » suis peu responsable ; « je » n'a pas besoin de miséricorde et de pardon), a développé une éthique qui a des points communs avec le décalogue mais avec une orientation profonde qui diverge profondément de l'orientation biblique.
Si certains éléments préparent à recevoir l'Incarnation du Verbe, la perspective générale de l'hindouisme se situe aux antipodes. L'idée d'un Dieu fait homme, d'un Dieu qui descend, d'un amour de Dieu pour ce qui est en dessous de Lui est à peu près impensable[10]. C'est pourtant précisément ce dont mère Térésa de Calcutta, qui a tant aimé l'Inde, a témoigné.
[1] Dans la Bible : « Ne fais à personne ce que tu n'aimerais pas subir » (Tb 4, 15)
[2] Mah?bh?rata, Anusasana parva, 113, 3-9 (ed. Ishwar Chundra Sharma et O.N. Bimali ; transl. according to M.N. Dutt, Parimal Publications, Dehli, vol. IX, p. 469).
[3] Par exemple : « Qu'il dise la vérité, qu'il dise des choses qui fassent plaisir, qu'il ne déclare pas de vérité désagréable et qu'il ne profère pas de mensonge officieux : telle est l'éternelle loi » (M?nava dharma??stra, 4, 138, p. 101) ; « Qu'il considère toujours l'action de frapper, celle d'injurier et celle de nuire au bien du prochain, comme les trois choses les plus pernicieuses dans la série des vices produits par la colère » (M?nava dharma??stra, 7, 51, p. 156).
[4] Commission théologique internationale, A la recherche d'une éthique universelle : Nouveau regard sur la loi naturelle, 20 mai 2009, § 13.
[5] Commission théologique internationale, Ibid., § 36
[6] Commission théologique internationale, Ibid. §13
[7] Joseph Marie Verlinde, L'expérience interdite, éditions saint Paul, Versailles 1998. p. 103-104
[8] Ibid., p. 105
[9] Ibid. , p. 106
[10] cf. Jean Daniélou, Le mystère du salut des nations, Seuil, Paris 1946, p. 60. 66. 67
Synthèse F. Breynaert