« Le titre "Fils de l'homme" n'existait pas en tant que titre à l'époque de Jésus.
Mais on peut sans doute en voir l'esquisse dans la vision de l'histoire universelle relatée dans le livre de Daniel avec les quatre bêtes et le "Fils d'homme". [...]
Les quatre bêtes représentent un pouvoir reposant avant tout sur la violence, un pouvoir de nature bestiale [...]
L'image du "Fils d'homme" qui arrive "sur les nuées du ciel" annonce un royaume absolument nouveau, un royaume "d'humanité". [...]
En tant que tel, le Fils de l'homme (de Daniel 7) ne symbolise pas une figure individuelle, mais il est la représentation du royaume dans lequel le monde parviendra à son but. »[1]
Nous sommes donc devant une réalité tout à fait nouvelle et surprenante.
Jésus, homme individuel, assume un titre qui désigne un royaume, donc un « collectif ».
L'image de la vigne et des serments, que saint Jean est le seul à transmettre (Jn 15, 1-8), est déjà sous-jacente au titre « Fils de l'homme », contenu dans les quatre évangiles. Et il est légitime de penser que toute une série d'affirmations théologiques que l'on trouve dans les lettres apostoliques ne sont qu'une explicitation de ce que Jésus a dit lui-même en se disant « Fils de l'homme » :
« Il n'est pas simplement un, mais de nous tous avec lui-même il ne fait "plus qu'un" (Ga 3, 28) : il nous transforme en une humanité nouvelle.
Le cortège entrevu de loin par Daniel ("comme un fils d'homme", Daniel 7) devient une personne, mais étant là pour la multitude, cette personne dépasse les limites de l'individu, embrasse une multitude, et devient avec la multitude un seul corps et un seul esprit (1 Co 6, 17). »[2]
Et Jésus veut nous emporter dans sa résurrection, devenant le premier-né d'une multitude de frères (Rm 8, 29).
Marie
Jésus s'étant proclamé « Fils de l'homme », l'Eglise primitive a donc regardé Marie comme celle qui est la « mère du Fils de l'homme » : l'Eglise primitive a donc embrassé d'un seul regard la mission de « Marie dans le mystère du Christ et de l'Eglise ».
Le concile Vatican II, en choisissant de situer Marie d'une manière indissociable « dans le mystère et de l'Eglise » est fidèle à la volonté de Jésus se désignant comme « Fils de l'homme ».
Le pape Benoît XVI, en revalorisant le titre « Fils de l'homme » offre finalement un nouveau fondement scripturaire au concile Vatican II qui situe Marie « dans le mystère du Christ et de l'Eglise »[3], et au titre « Marie mère de l'Eglise ».
Marie, mère du Fils de l'homme, est donc la mère de l'Eglise.
[1] JOSEPH RATZINGER, BENOIT XVI, Jésus de Nazareth, Flammarion, Paris 2007, p. 354-355
et : « Beaucoup d'exégètes supposent qu'il pourrait y avoir derrière ce texte une version où le fils d'homme était aussi une figure individuelle, mais, quoi qu'il en soit, nous ne connaissons pas cette version et elle demeure une hypothèse. Les textes souvent cités de IV Esdras 13 et de l'Ethiopien Enoch, dans lesquels le Fils de l'homme est représenté comme une figure individuelle, sont plus récents que le Nouveau Testament et ne peuvent donc être considérés comme une de ses sources. » Ibid., p. 355
[2] JOSEPH RATZINGER, BENOIT XVI, Jésus de Nazareth, Flammarion, Paris 2007, p. 362-363
[3] Titre du chapitre VIII de Lumen gentium à Vatican II.
Françoise Breynaert