"O Mère céleste, Notre-Dame, vous qui avez donné à cette nation tant de gages insignes de votre prédilection, implorez pour elle votre divin Fils, ramenez-la au berceau spirituel de son antique grandeur, aidez-la à recouvrer, sous la lumineuse et douce étoile de la foi et de la vie chrétienne, sa félicité passée, à s'abreuver aux sources où elle puisait jadis cette vigueur surnaturelle, faute de laquelle les plus généreux efforts demeurent fatalement stériles, ou tout au moins bien peu féconds ; aidez-la aussi, unie à tous les gens de bien des autres peuples, à s'établir ici-bas dans la justice et dans la paix, en sorte que, de l'harmonie entre la patrie de la terre et la patrie du ciel, naisse la véritable prospérité des individus et de la société tout entière.
Mère du bon conseil, venez au secours des esprits en désarroi devant la gravité des problèmes qui se posent, des volontés déconcertées dans leur impuissance devant la grandeur des périls qui menacent.
Miroir de justice, regardez le monde où des frères, trop souvent oublieux des grands principes et des intérêts communs qui devraient les unir, s'attachent jusqu'à l'intransigeance aux opinions secondaires qui les divisent, regardez les pauvres déshérités de la vie dont les légitimes désirs s'exaspèrent au feu de l'envie et qui parfois poursuivent des revendications justes, mais par des voies que la justice réprouve, ramenez-les dans l'ordre et le calme, dans cette "tranquillitas ordinis" qui, seule, est la vraie paix !
Regina pacis ! Oh ! oui. En ces jours où l'horizon est tout chargé de nuages qui assombrissent les cœurs les plus trempés et les plus confiants, soyez vraiment, au milieu de ce peuple qui est vôtre, la Reine de la paix ; écrasez de votre pied virginal le démon de la haine et de la discorde ; faites comprendre au monde, où tant d'âmes droites s'évertuent à édifier le temps de la paix, le secret qui, seul, assurera le succès de leurs efforts : établir au centre le trône royal de votre divin Fils et rendre hommage à sa loi , en laquelle la justice et l'amour s'unissent en un chaste baiser, justitia et pax osculate sunt (Ps 84).
Et que, par vous, la France, fidèle à sa vocation, soutenue dans son action par la puissance de la prière, par la concorde dans la charité, par une ferme et indéfectible vigilance, exalte dans le monde le triomphe et le règne du Christ, prince de la paix, Roi des rois et Seigneur des seigneurs.
Amen !"
Prière formulée par le cardinal Pacelli, alors cardinal légat en France, (et futur pape Pie XII), en terminant son discours sur la vocation de la France, le 13 juillet 1937.