Abercius : La Vierge et l’Eucharistie


 

Abercius (IIe s.) fut le  premier évêque d’Hiérapolis, l'antique cité d’Asie mineure qui fut un important centre religieux de l'Empire romain d'Orient. Abercius est un saint populaire dans toute l'Église orthodoxe. Sur la foi des synaxaires médiévaux, il est honoré le 22 octobre (et peut-être localement le 22 novembre) comme premier évêque d'Hiérapolis, thaumaturge et surtout grand évangélisateur.

 

***

 

Hiérapolis

Hiérapolis a été une station thermale, créée vers la fin du IIe siècle av. J.-C. Elle est située près des sources chaudes de Pamukkale et de la ville de Denizli en Turquie. Elle est inscrite depuis 1988 conjointement avec Pamukkale sur la liste du patrimoine mondial.

L’épitaphe d’Abercius


L’épitaphe d’Abercius, la plus ancienne inscription chrétienne connue. Giovanni Dall'Orto, Attribution, via Wikimedia Commons.

 

Abercius est connu pour l'inscription du nom d’‘Épitaphe d'Abercius’,  dont nous possédons deux fragments, retrouvés en 1883 et conservés dans le musée du Latran à Rome. C’est la plus ancienne inscription chrétienne connue. L'inscription daterait de l'année 216 après J-C.  Rédigée en langage symbolique et mystérieux, elle est d'une importance majeure, parce qu'elle rappelle

- Le Christ pasteur

- L'Église

- L'Eucharistie (le vin et le pain)

- Le "poisson" avec son sens christologique, IXTYS = Jésus Christ Fils de Dieu Sauveur,

- La Vierge, identifiable avec Marie comme avec l'Église, ou, mieux, avec les deux ensemble, dans leur fonction de "Vierge-mère."

« Mon nom est Abercius. Je suis le disciple d'un pur pasteur qui dirige la troupe de ses agneaux à travers monts et plaines, et dont l'œil immense voit toutes choses, car il m'a appris les lettres dignes de foi.

C’est lui qui m'a fait entreprendre le voyage de Rome pour y voir une reine à la robe et aux sandales d'or[1].

J'ai vu ici un peuple qui porte un sceau lumineux[2]. J'avais avec moi Paul.

La foi me guidait et me procurait en tout lieu pour nourriture un poisson très grand et très pur[3], recueilli à la source par une vierge sans tache, et c'est ce qu'elle sert constamment à la table des amis, elle a un vin excellent qu'elle verse pour accompagner le pain.»

Cet épigraphe parle d'une vierge chaste qui a pêché le poisson mystique, le Christ, et le distribue aux amis, de manière à ce qu'ils puissent s'en nourrir toujours. Cette vierge distribue aussi le vin uni au pain. Les auteurs ne sont pas d'accord dans l'identification de cette "chaste vierge". Quelques-uns y voient Marie, d'autres l'Église.

Cette alternative souligne le lien étroit existant entre Marie et l'Église et entre Marie, l'Église et le Christ eucharistique. L'expression « vierge chaste » semble exprimer la stupeur pour le mystère de la conception virginale et l'admiration pour la mère de Jésus. Marie, mère du corps de Christ est aussi mère de l'Eucharistie. Marie comme l'Église donnent aux chrétiens le Christ Eucharistique pour nourriture. Cette doctrine est exprimée avec le langage respectueux du culte.

 

[1] L’Église.

[2]Le peuple portant le sceau, c'est la communauté chrétienne (l'image du sceau, σφραγἱς, pour parler du baptême est bien attestée à l'époque).

[3] l'Ichthys (Poisson) est le symbole du Christ que la foi offre à la manducation des fidèles par l’eucharistie.

 

***

Pour en savoir plus

 

-sur les chrétiens du IIe siècle : dans le monde mais pas de ce monde, dans l’Encyclopédie mariale

-sur les pères apostoliques du IIe siècle et Marie, dans l’Encyclopédie mariale

 

A.Gila et l’équipe de MDN.