« Marie est la première de ces "petits" dont Jésus dira un jour : "Père, ...tu as caché cela aux sages et aux intelligents et tu l'as révélé aux tout-petits". »
(Jean Paul II, Lettre encyclique Redemptoris Mater, § 17)
L'humilité dans le plan créateur, et dans la perspective trinitaire.
L'humilité est liée à la condition de créature et à la vocation de l'homme créé à l'image de Dieu, qui n'a donc pas en lui sa propre essence, mais en Dieu[1]. L'humilité est donc liée à l'obéissance à Dieu. Dieu est amour, Dieu est « Je suis » et « Je suis équivaut à Je me donne entièrement à un tu, ou je ne fais qu'un avec un tu et ainsi nous sommes un »[2] ; de même, l'humilité envers Dieu et l'obéissance à Dieu ne sont pas une destruction de la personne, mais son accomplissement.
L'humilité et l'obéissance de Marie sont sublimes parce que la relation de Marie à la très Trinité est sublime. Les artistes et les mystiques ont évoqué cette sublime humilité de Marie[3].
L'Incarnation.
Quand celui qui éternel entre dans le temps, quand celui qui est infini entre dans un espace limité, alors nous ne parlons plus seulement d'humilité, mais de kénose.
Et pour réaliser cela, Dieu choisit Marie dont l'humilité rejoint celle du Fils de Dieu qui se fait homme - "Il a regardé l'humilité de sa servante" (Lc 1, 48).
C'est alors que saint François comprit que l'humilité à suivre est celle de Marie, qui se joignit parfaitement à celle du Fils de Dieu qui se faisait homme.[4]
La croix, ou plutôt le mystère pascal.
La croix est la descente (la kénose) du Fils de Dieu jusqu'à la mort. Cette descente nous montre le chemin de l'humilité et donc aussi de l'amour, et c'est pourquoi la Passion est « rédemptrice ». Le Croix est un passage, une « Passion », un « Passage » ; le sacrifice de Jésus est un sacrifice « pascal », comme l'agneau pascal de la première Alliance avant la traversée de la mer rouge. C'est pour une libération, un salut[5].
L'humilité de Marie est sublime parce que Marie est unie de manière indissoluble à son Fils, et elle le suit dans son chemin pascal.
Marie est notre modèle mais elle est aussi un cas unique.
Marie est notre modèle « dans l'Ordre de la foi, de la charité et de la parfaite union au Christ »[6]. Elle a vécu l'humilité et l'obéissance par un rapport direct à Jésus que nous ne pouvons pas vivre de la même manière ; nous vivons l'humilité et l'obéissance à travers des médiations humaines qui sont imparfaites et que nous devons discerner avec l'Esprit Saint, l'Eglise, bien qu'elle soit appelée « le corps du Christ » n'est pas le corps physique du Christ, et ceux qui font (ou enseignent) cette confusion offensent Dieu car ils « soumettent le Christ Notre-Seigneur aux erreurs et à l'inclination au mal de l'humaine nature. »[7]
(Quand l'humilité et l'obéissance sont enseignées sans se référer à leur fondement théologal ou théologique (précis, délicat), alors il y a des faux-semblants particulièrement dangereux et finalement sectaires, avec des pratiques visant à humilier et à briser d'autres personnes (d'où dépression, déresponsabilisation, aliénation, perte de la dignité - en quoi cela rend-il gloire à Dieu ?) tandis que la dureté et l'attitude pharisienne n'est même pas remarquée.
L'explication brève des fondements théologiques montre que la véritable humilité chrétienne libère, unit au Christ, et fait communier au Dieu créateur, un et trine.)
[1] Catherine de Sienne, Vie, par le bienheureux Raymond, 1re part., ch. 10. Saint Augustin, Confessions, I, 1 et Confessions, X, 5, 7
[2] Edith Stein, L'être fini et l'être éternel, Ed Nauwelaert, Paris 1972 (Fribourg 1950), p. 351
[3] Cf. Enguerrand Charonton, Le couronnement de Marie, 1454, huile sur toile, 183 x 220 cm. Hospice, Villeneuve-les-Avignon
[4] S. CECCHIN, Maria Signora Santa e Immacolata nel pensiero francescano, PAMI, città del Vaticano, 2001, p. 53- 54
[5] He 5, 8-9
[6] Vatican II, Lumen Gentium 63
[7] Parce qu'il faut distinguer l'Eglise corps du Christ de ce qui se prétendrait directement un corps physique : « On en trouve, en effet qui, ne remarquant pas assez que saint Paul n'emploie ici les mots qu'au sens figuré, et ne distinguant pas, comme il le faut absolument, les sens particuliers et propres de corps physique, moral, mystique, introduisent une fausse notion d'unité, quand ils font s'unir et se fondre en une personne physique le divin Rédempteur et les membres de l'Eglise et tandis qu'ils accordent aux hommes des attributs divins, ils soumettent le Christ Notre-Seigneur aux erreurs et à l'inclination au mal de l'humaine nature. » (Pie XII, Lettre encyclique Mystici Corporis, 1943).
Françoise Breynaert