Marie ne se préféra jamais à personne
Le premier acte d'humilité de cœur, c'est d'avoir une basse opinion de soi-même. Or, la Vierge eut toujours de si bas sentiments d'elle-même, que, tout en se voyant plus comblée de grâce que tous les hommes et tous les anges, elle ne se préféra jamais à personne. [...]
Marie voyait sa petitesse
Ce n'est pas cependant que la bienheureuse Vierge se crût une pécheresse, car l'humilité est la vérité, et Marie savait bien qu'elle n'avait jamais offensé le bon Dieu. Ce n'est pas non plus qu'elle refusât de reconnaître que Dieu lui avait accordé plus de grâces qu'à toutes les autres créatures, car un cœur humble sait reconnaître les faveurs spéciales de Dieu, afin de s'en humilier davantage. A la lumière plus grande qui lui découvrait l'infinie grandeur et bonté de Dieu, elle voyait plus clairement aussi sa propre petitesse. [...]
Marie glorifiait le Seigneur
Lorsque Elisabeth dit à la Vierge "Vous êtes bénie entre toutes les femmes. D'où me vient ce bonheur que la mère de mon Dieu vienne jusqu'à moi ? Bienheureuse êtes vous d'avoir cru" (Lc 1, 48). Que fait Marie ? Rapportant toutes ces louanges à Dieu, elle répond par ce cantique d'humilité : "Mon âme glorifie le Seigneur". C'est comme si elle disait : Elisabeth, vous me louez, mais moi je glorifie le Seigneur à qui est due toute gloire. Vous admirez que je sois venue à vous, mais moi j'admire la bonté de Dieu : "mon âme a tressailli d'allégresse en Dieu mon Sauveur" (Lc 1, 46-48). Vous me louez d'avoir cru, mais moi je loue mon Dieu parce qu'il lui a plu d'exalter mon néant, et parce qu'il a regardé la bassesse de sa servante.
Marie aimait servir les autres
Disons de plus que le propre de l'humilité c'est de se plaire à servir les autres. Aussi la Vierge s'empressa-t-elle de se rendre auprès de sa cousine Elisabeth pour la servir pendant trois mois. Elisabeth s'étonna que la Vierge soit venue la visiter...
Elle se tenait volontiers à l'écart
En outre, les personnes humbles se tiennent volontiers à l'écart et choisissent la dernière place. C'est pourquoi Marie, désirant un jour s'entretenir avec Jésus qui prêchait dans une maison (Mt 12, 46), ne voulut pas, même en vertu de son autorité, remarque saint Bernard[1], interrompre le discours de son Fils, ni pénétrer dans la demeure où il parlait. [...]
Elle partagea le déshonneur de son Fils
Enfin l'humilité fait aimer les mépris. On ne lit pas que Marie se soit montrée à Jérusalem le jour des Rameaux, alors que le peuple recevait son Fils avec tant d'honneurs. Par contre, quand Jésus va mourir, elle ne craint pas de paraître sur le Calvaire en présence de tout le monde, afin d'être reconnue pour la mère de celui qui, condamné comme infâme, mourait de la mort des infâmes, et de partager son déshonneur. [...]
Cache-toi sous mon manteau...
Les orgueilleux lui font horreur et elle n'appelle à elle que les âmes humbles : si quelqu'un est petit, qu'il vienne à moi (Pr 9, 4). Marie elle-même d'ailleurs a pris soin de le faire entendre en disant à Brigitte :
"Viens, ma fille et cache toi sous mon manteau : ce manteau, c'est mon humilité."
Puis après avoir fait remarquer que la considération de son humilité est un excellent manteau qui réchauffe bien les âmes, elle ajouta :
"Un manteau ne réchauffe pas, si on ne le porte pas ; ainsi pour tirer avantage de mon humilité, il faut qu'on la porte, non seulement dans ses pensées, mais encore dans ses œuvres." [2]
[1] Cf. Saint Bernard, Sermon des douze étoiles, § 10
[2] Brigitte, Revelationes, II, 23
Discours sur les vertus de Marie, dans "Les gloires de Marie"
(éditions Saint Paul, Paris 1987, p.282-285)
L’humilité de Marie, un manteau qui réchauffe (St Alphonse de Liguori)