Elle a pris la suite des travaux des orientalistes depuis le milieu du 19ème siècle, bénéficiant de l’apport des méthodes d’analyse et d’exégèse expérimentées sur le judaïsme et le christianisme. Des progrès considérables ont été accomplis depuis les années 80 avec le développement des disciplines de recherche (histoire, numismatique, archéologie, exégèse, philologie, paléographie, linguistique …), les nouvelles technologies qui permettent des études inédites (analyse informatique du texte coranique) et surtout la mise en réseau de chercheurs issus des domaines les plus variés. La comparaison de leurs travaux ouvre de nouvelles perspectives pour l’islamologie.
L’application des méthodes modernes d’analyse historico-critique aux textes et traditions musulmanes ont démontré leur caractère très tardif (postérieures de 200 ans au moins après les faits décrits) et leur caractère légendaire. Composés pour justifier la religion nouvelle, ils n’ont pas vocation à transmettre un témoignage historique mais se composent de textes normatifs et apologétiques. Par eux-mêmes, ils sont insuffisants à établir dans toute la rigueur historique que l’histoire des origines de l’islam, comme nous pensions la connaître d’après le discours musulman, se serait effectivement passée ainsi
Il est aujourd’hui démontré qu’il a existé des courants religieux dès le 1er siècle qui se revendiquaient d’un monothéisme hébraïque « pur » et exclusif. Leurs adeptes se considéraient comme seuls vrais disciples de Moïse et seuls vrais disciples de Jésus, niant sa divinité affirmée d’abord par les chrétiens. Ces grands concepts de l’islam existaient donc avant l’islam.
Le contexte particulier des événements qui suivent la mort de Mahomet est de mieux en mieux connu. Les découvertes à son sujet entrent souvent en contradiction avec la tradition islamique, et suscitent ainsi de très nombreuses interrogations :
L’étude approfondie des cas de La Mecque et du Coran illustrent encore l’élaboration progressive des dogmes de l’islam.
Contrairement à ce qu’en dira ultérieurement la tradition islamique, qui la fera remonter à Abraham, La Mecque ne pouvait pas exister comme une grande ville avant la fin du 7ème siècle. Il n’y a sur place aucune trace archéologique ni aucune trace historique pour l’attester.
Il est, et il était, impossible d’y vivre et maintenir une cité sans apporter de l’extérieur tous les éléments nécessaires (nourriture, fourrage pour les animaux, matériaux de construction, bois de chauffage, …), c’est-à-dire sans le soutien d’un pouvoir centralisé.
Par ailleurs, le processus qui va conduire à donner au Coran le statut d’un livre parfait, écrit par Dieu et copie d’un original céleste est maintenant <s>bien</s> connu et daté : c’est à Bagdad, à partir du règne du calife al-Mutawakkil (en 847) que les califes Abbasides tranchent le débat <s>qui existait</s> en faveur du caractère incréé du Coran, mettant fin à son élaboration. Comme en témoignent toutes les altérations des versions <s>les</s> plus anciennes du Coran observables sur les manuscrits anciens, l’analyse de ses sources et de son contexte, comme l’a montré son étude récente par la théorie des codes, le Coran a en réalité été écrit par des dizaines d’auteurs différents, sur plusieurs siècles, et ce à mesure qu’étaient écrits tous les dogmes et autres textes fondateurs de l’islam, et que se fixait définitivement l’écriture de la langue arabe (calligraphie, alphabet, grammaire, vocabulaire…).
Toutes ces découvertes sont absolument incompatibles avec la doctrine officielle musulmane et elles obligent ainsi à repenser complètement la question des origines de l’islam. L’hypothèse de la constitution de l’islam à partir de de mouvements ex-chrétiens et ex-judéochrétiens monophysites, prônant le retour physique de Jésus comme instrument de la justice divine, apparait de plus en plus pertinente. C’est celle que soutient en particulier le Père Édouard-Marie Gallez (Le Messie et son Prophète, 2005-2010), à la suite d’autres orientalistes (Paul Casanova, Patricia Crone), seul cadre conceptuel qui, en l’état du dossier historique, permette de rendre compte de l’ensemble de ses éléments, textes et traditions musulmanes comme des découvertes absolument incompatibles avec eux.
Le schéma qui se dégage de ces études convergentes est finalement très logique : les califes <s>o</s>nt pris la suite des conquêtes militaires de Mahomet ; éliminant leurs rivaux, poursuivant l’expansion territoriale, ils ont acquis un pouvoir absolu. L’édification progressive de l’islam s’est faite dans leur intérêt évident, confortant les musulmans dans la légitimité divine de leur domination, et permettant à leurs chefs de se présenter comme les successeurs d’un « envoyé de Dieu », sans doute Jésus dans un premier temps, puis Mahomet, à mesure que la tradition constituait sa figure prophétique.
L’exemple de la Corée du Nord offre aujourd’hui un exemple similaire éloquent pour montrer le processus de rectification historique qui se met en place quand un pouvoir absolu et totalitaire a la capacité de décider seul de l’Histoire officielle.
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