L’inexplicable guerre civile menée par Abu Bakr (632-634)
Après la mort de Mahomet, les tribus qu’il avait rassemblées pour les 60 razzias qui ont fait sa fortune et sa gloire repartent chez elles et Abu Bakr doit leur faire la guerre pour s’imposer comme son successeur, comme si rien n’était prévu. Les raisons avancées par les musulmans pour cette première guerre civile interne aux Arabes ne sont pas vraisemblables. Ils invoquent des motifs de légitimité politique et/ou religieuse, sur fond de scission des chiites et des kharidjites autour de l'assassinat d'Ali (par des kharidjites), puis de celui de ses fils par le pouvoir califal. Qui avait raison ? Qui a raison aujourd’hui ? Qui croire ?
En réalité, la guerre civile est intrinsèque au messianisme politique avec affrontement de factions rivales sur des motifs de légitimité politique et religieuse (qui est digne de régner au nom de Dieu ?).
C’est à la suite de la mort de Mahomet que doivent être inventés les premiers concepts propres à l’islam, dans le cadre de la concurrence en termes de légitimité des différentes factions, et à partir de l’espérance messianiste transmise par les Nazaréens aux Arabes. Abu Bakr ne portera pas le titre de Calife, qui signifie non pas successeur mais « lieutenant » de Dieu, mais cette notion s’imposera par la suite.
En 637, Omar (634-644) parvient enfin à prendre Jérusalem et il rebâtit aussitôt le Temple, ce qui n’est pas explicable selon la vision musulmane classique
Quand Omar (634-644) parvient à prendre Jérusalem en 637, il rebâtit aussitôt le Temple comme en témoignent par exemple l’évêque gaulois Arculf dans son récit de voyage, 30 ans après. D’autres témoignages juifs confirment en disant que des « fils d’Ismaël » ont reconstruit le Temple (cf. Robert G. Hoyland (Seeing islam as others saw it, 1998 – L’islam Comme il a été perçu par les Autres)ou Alfred-Louis de Prémare (Les fondations de l’islam, Editions du Seuil, 2002)
La reconstruction du Temple de Jérusalem est faite au temps de l’alliance entre les judéo-nazaréens et les Arabes, avec rétablissement du culte sacrificiel ancien dans l’espoir de faire revenir le « Messie Jésus », mais on constate peu après une rupture d'alliance, des disputes entre « Juifs » et Arabes relatée par des témoins d’époque, puis finalement l’expulsion des Juifs d'Arabie par Omar en 640. Tous ces faits sont absents de l’histoire musulmane classique et inexplicables par elle.
Les premières mosquées n’étaient pas tournées vers La Mecque avant 715 (80 ans après la mort de Mahomet !)
Toutes les mosquées construites avant 715 ne sont pas tournées vers La Mecque et il s’agit de dizaines de cas. Par exemple la Mosquée de Foustat au Caire, qui date de 640 et qui est tournée vers la Syrie. La Mosquée de Médine qui est à deux directions dont l’une pointe sur Jérusalem, exactement. Après 640, la direction est floue mais aucune n’est tournée vers la Mecque. C’est seulement au 8ème siècle que les mosquées sont systématiquement orientées vers la Mecque.
Le 3ème calife, Othman (645-656), doit refaire un Coran sans voyelles et détruire tous les textes arabes de l’époque, ce qui ne s’explique pas si un Coran parfait était tombé du Ciel
L’histoire classique musulmane explique que le 3ème calife, Othman (645-656) a du refaire une version nouvelle du Coran et détruire toutes les autres versions qui étaient en circulation. Cette attitude est incompatible avec la thèse d’un Coran incréé et parfait, tombé du Ciel et dicté à Mahomet, car dans ce cas il est bien évident que personne n’aurait osé changer quoi que ce soit à un texte si normatif.
L’Histoire véhiculée par les sources musulmanes, rend compte de la destruction systématique des documents religieux hétérodoxes et de la persécution très violente des opposants politiques, des hérétiques, des hypocrites.
Les autodafés des Califes conduisent au « Trou noir » arabe des 7ème et 8ème siècles
Les chercheurs parlent du « trou noir » historique des 7 et 8ème siècles dans la mesure où il n’y existe quasiment pas de documents et sources musulmanes avant le 9ème siècle, 200 ans après la mort de Mahomet, à part des fragments Coraniques, les inscriptions du Dôme du Rocher, des graffitis, et des pièces de monnaie qui ne donne qu’une vision très partielle des choses …
Les premiers recueils de Hadiths par Boukhari et Muslim ne sont pas publiés avant le 9ème siècle (également les recueils d’Al Nasai, d’Abu Dawood, d’Al Tirmidhi et d’Ibn Majah aux 9e et 10e siècles). La Biographie de Mahomet (sîra) de Ibn Hicham est également du 9ème siècle ; quelques fragments d’autres auteurs antérieurs ont été retrouvés, mais ils présentent des versions hétérodoxes. L’Exégèse du Coran (tafsir) est aussi tardive : Tafsir At-Tabari, par Tabari, fin 9ème début 10ème siècle. De même les Chronique historique : Histoire des prophètes et des rois, par Tabari, 10e siècle. Tout ceci n’est explicable que par une volonté délibérée du pouvoir des califes, car il n’y a jamais eu de moment où ils n’avaient pas le pouvoir absolu.
Les Coran d’Othman ont été détruits par les musulmans eux-mêmes …
Il n’y a pas aujourd’hui de Coran complet avant le 9ème siècle : les premiers codex complets sont conservés ceux de la mosquée Al Hussein, au Caire (Egypte) et du musée de Topkapi (Istanbul). Ces recueils sont appelés à tort « Corans d’Othman » par les musulmans, alors que les spécialistes les ont datés comme postérieurs de 150 ans au moins à Othman (François Déroche parle au sujet de ce qualificatif de « pieuse forgerie »). Selon les traditions musulmanes, Othman aurait dirigé la première édition du texte Coranique en 650, et fait écrire 4 ou 5 recueils Coraniques, « authentiques verbatim de Mahomet », expédiés dans les grandes villes de l’empire pour y servir d’exemplaires de référence. Or aucun de ces recueils ne nous est parvenu. S’ils ont existé, il faut se rendre à l’évidence qu’ils ont alors été détruits par les musulmans eux-mêmes : pourquoi ? Les chercheurs disposent certes de manuscrits anciens antérieurs au 9ème siècle, mais en eux-mêmes, ils ne peuvent établir l’existence du Coran comme on le connait à partir du 9ème siècle.
Les manuscrits les plus anciens sont tous écrits en alphabet arabe du Nord (Syrie) et non du Sud (La Mecque, Médine) et ils témoignent d’un contexte syriaque
Les premiers fragments de manuscrits Coraniques connus, à partir de 675 et jusqu'au 9e siècle, sont des documents étonnants qui montrent à l’évidence de nombreuses traces de réécriture, correction, grattages et palimpsestes, avec des ratures, des trous dans les pages, etc ... Manifestement, personne ne se gênait pour corriger et réécrire ces textes qui étaient écrits sans voyelles et dans un alphabet qui est celui de l’arabe du Nord (Syrie) et non du Sud (Arabie). On y retrouve des textes araméens (syriaques) qui ont perdu leur sens premier avec la traduction en arabe (cf. Christoph Luxenberg - Die Syro-Aramäische Lesart des Koran (2004) : « La Lecture Syro-araméenne du Coran » - Manfred Kropp - Vom Koran zum islam: Schriften zur frühen islamgeschichte und zum Koran (2009) : « Du Coran à l’islam : témoignages épigraphiques de la primo-histoire de l’islam et du Coran »), et aussi des textes apocryphes ou profanes (midrash, traditions juives, thora et livres sacrés juifs, évangiles chrétiens et textes apocryphes, homélies, contes et légendes, traités de médecine, récits historiques ... Le contexte syriaque de l’écriture du Coran a été démontré par Alphonse Mingana (Syriac influence on the style of the Kur’an, 1927 –L’influence syriaque dans le style du Coran). Manfred Kropp (Vom Koran zum islam: Schriften zur frühen islamgeschichte und zum Koran, 2009 (Du Coran à l’islam : Témoignages Épigraphiques de la Primo-histoire de l’islam et au Coran) a montré le caractère de scriptio defectiva de ces fragments (écriture incomplète, sans signes diacritiques, sans voyelles, caractère « brouillon » des manuscrits)
La tradition musulmane et sa fiabilité sont très souvent indirectement critiquées par elle-même et par les conflits incessants des différentes interprétations
Comment se fier à une traidtion lorsqu’elle rend compte de l’élimination impitoyable des proches de Mahomet (Ahl al-Bayt) par le pouvoir califal, lorsqu’elle décrit la conduite indigne de plusieurs califes (Muawiya, As Saffah …), lorsqu’elle reconnait le processus chaotique de rassemblement et d’édition du Coran (disparition de sourates entières, remaniements, …), lorsqu’elle aboutit au schisme entre sunnites et chiites qui intervient sous Ali (656-661) en témoignant de ces luttes internes incessantes. Qui a raison entre chiites et sunnites ? Personne ne sait donner une explication objective basée sur une interprétation incontestable venant des origines.
Muawiya (662-680) est à Damas le 1er calife Omeyyade et jusqu’à son successeur Abd El Malik (685-705) les califes utilisaient des pièces de monnaie avec des croix jusqu’en 680
Les califes utilisaient en fait des pièces de monnaies byzantines que lesquelles ils avaient substitué leur image à celle des Empereurs byzantins, mais le symbole de la Croix, officiellement honni par l’islam, ne les a curieusement pas gênés jusqu’en 680, date à partir de laquelle la Croix est remplacée par un poteau. En réalité, il y a une absence totale de références musulmanes à Mahomet jusqu'aux années 685 : c’est un opposant au Calife qui le premier fait figurer sur les pièces de monnaie à son effigie les premières références à Mahomet. Ensuite des pièces à l’effigie d’Abd El Malik (685-705) et les inscriptions du Dôme du Rocher (692) feront référence à Mahomet, mais ce sera 50 ans après sa mort seulement.
De nombreux témoignages matériels (archéologie, numismatique, ...) révélant ainsi la construction progressive des dogmes de l’islam ont été rassemblés par Leila Qadr et Arrun Amine Saad Edine (Les 3 visages du Coran, 2014).