Icône de saint Irénée
Saint Irénée de Lyon est un évêque du IIès, Père, Docteur de l'Église et sans doute martyr (✝ v. 202). Alors qu'il était originaire d'Orient, il a exercé son ministère épiscopal en Occident : il a ainsi été un pont spirituel et théologique entre les Chrétiens d'Orient et d'Occident.
Son nom, Irénée, vient du grec "eiréné", qui signifie la paix, et, comme le pape François l'a souligné, il exprime « cette paix qui vient du Seigneur et qui réconcilie, rétablissant l'unité". C’est à ce titre que saint Irénée est devenu, le 21 janvier 2022, Docteur de l'Église, avec le titre de « Doctor unitatis », "Docteur de l'unité", en considération de tout ce que saint Irénée a fait pour la paix entre les Églises.
Dans sa jeunesse, saint Irénée fut disciple de saint Polycarpe de Smyrne, lui-même disciple de saint Jean, et saint Irénée conserva ainsi fidèlement la mémoire du temps des Apôtres. Succédant à l’évêque saint Pothin à Lyon, certains pensent qu’il fut lui-même martyr. On le fête le 28 juin.
"En tant qu'écrivain, il [saint Irénée] poursuit un double objectif: défendre la véritable doctrine des attaques des hérétiques, et exposer avec clarté les vérités de la foi"
affirme le pape Benoît XVI lors de son audience du 28 mars 2007. L’œuvre de saint Irénée, premier grand théologien de l'Église d'Occident, est donc à la fois apologétique et catéchétique, et se déploie dans deux ouvrages : le premier, en cinq livres, se nomme Contre les hérésies (Adversus haereses), et le second, l'Exposition de la prédication apostolique (que l'on peut également appeler le plus ancien "catéchisme de la doctrine chrétienne"), dédié à son ami Marcien, transmet fidèlement la Tradition conforme à l’enseignement du Christ et des Apôtres.
Allégorie : les Écritures triomphant sur l’hérésie. Détail du retable de l’Église Gustaf Vasa, Stockholm.
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Nombreuses sont au IIès les sectes gnostiques qui prétendent enseigner la foi chrétienne, en prétendant que le salut s’obtient par la connaissance et non par la foi. Saint Irénée va s’attaquer frontalement à ces écrits gnostiques et ésotériques, et notamment à Valentin et à son évangile de la vérité, dans son ouvrage Contre les hérésies. Saint Irénée y développe toute une théologie du Salut, qu’il nomme vraie théologie, pour l’opposer à cette fausse théologie du salut par la connaissance, qui n’est pas fidèle à la foi chrétienne.
La théologie du Salut que Saint Irénée développe est ancrée dans l’histoire du Salut, dont on trouve trace dans l’ensemble de la Bible. Par "Salut", en effet, saint Irénée n'entend pas seulement la restauration d'une fracture arrivée entre Dieu et l'homme, mais plutôt le projet divin, pont d'union qui fait descendre Dieu dans l'homme et transporte l'homme en Dieu. L’Incarnation de Jésus, Verbe incarné - que les gnostiques récusaient- permet donc la réalisation du projet de Dieu ou l'humanisation de Dieu et la divinisation de l'homme.
L'arbre de la vie et l'arbre de la mort. Ève et Marie Nouvelle Ève. Enluminure
Puisque l’Incarnation advient par grâce et par la Vierge Marie, par le ‘oui ‘ qu’Elle a donné en réponse à l’Ange lors de l’Annonciation, Marie occupe une place centrale dans l’Histoire du monde et du Salut. Elle est en effet le fondement historique et la garantie du Salut. Saint Irénée, dans le commentaire qu’il a fait du Magnificat, a mis en valeur la joie et l’exultation de la Vierge Marie et il l’a mis en perspective avec celle d’Abraham, conférant ainsi une cohérence dans l’histoire du Salut telle qu’elle est rapportée dans l’Ancien comme dans le Nouveau Testament. En outre, on peut dire que la Vierge Marie est présente de façon permanente dans l’histoire du Salut, en permettant au Christ de s’incarner en son sein, mais aussi pour tous les hommes. Marie est donc nécessaire au Salut. Enfin, par le lien que saint Irénée établit entre la naissance virginale de Jésus et celle des Chrétiens opérée à travers la foi et le baptême, saint Irénée introduit presque une identité de la Mère du Christ avec la Mère-église.
Les Pères de l’Église ont longuement médité sur la sainteté de Marie : dès le IIè siècle, en effet, la doctrine de l'Immaculée Conception est implicite dans le fréquent parallélisme Ève/ Marie qui a été développé par St Irénée, St Justin et Tertullien. De même qu’on nommera Jésus le Nouvel Adam, Marie est donc bien la Nouvelle Ève, son avocate, et saint Irénée affirme que la volonté du Christ est que le monde soit redevable à la Vierge Marie du mystère de l’Incarnation, afin que l’on puisse reconnaître en Marie le principe de tout bien.
Hans Memling. Le Jugement dernier. V.1467-1471. Hans Memling, Public domain, via Wikimedia Commons.
Au livre V de son œuvre Contre les hérésies, saint Irénée traite de la fin des temps. Son enseignement sur l'Antéchrist et le jugement mettent en lumière l’infini respect de Dieu Père pour la liberté humaine et le sens de l'histoire. Saint Irénée donne également un enseignement sur la résurrection des justes, la résurrection de la chair, et par cet enseignement saint Irénée parle de la fidélité de Dieu à sa création et de la cohérence de son dessein.
Le tableau de Marie qui défait les nœuds, de Schmidtner (v.1700)
La récente dévotion à Marie qui défait les nœuds a permis de reprendre l’interprétation théologique de la métaphore du nœud selon saint Irénée. Celui-ci parle en effet du nœud de la désobéissance, formé par Ève, qui a été dénoué par la Vierge Marie. Ce symbole fort du nœud a donc pu devenir le support d’une méditation théologique sur les nœuds présentés à la Vierge Marie pour être dénoués.