Le don de Piété est répandu dans nos âmes par le Saint-Esprit pour combattre l'égoïsme, qui est l'une des mauvaises passions de l'homme déchu, et le second obstacle à son union avec Dieu.
Le coeur du chrétien ne doit être ni froid ni indifférent; il faut qu'il soit tendre et dévoué; autrement il ne pourrait s'élever dans la voie à laquelle Dieu, qui est amour a daigné l'appeler. L'Esprit-Saint produit donc en l'homme le don de Piété, en lui inspirant un retour filial vers son Créateur.
« Vous avez reçu l'Esprit d'adoption, nous dit l'Apôtre, et c'est par cet Esprit que nous crions à Dieu: Père! Père »! (Rom.,VIII, 15.)
Cette disposition rend l'âme sensible à tout ce qui touche l'honneur de Dieu. Elle fait que l'homme nourrit en lui-même la componction de ses péchés, à la vue de l'infinie bonté qui a daigné le supporter et lui pardonner, à la pensée des souffrances et de la mort du Rédempteur.
Le don de la soumission filiale envers le Père
L'âme initiée par le don de Piété désire constamment la gloire de Dieu; elle voudrait amener tous les hommes à ses pieds, et les outrages qu'il reçoit lui sont particulièrement sensibles. Sa joie est de voir le progrès des âmes dans l'amour, et les dévouements que cet amour leur inspire pour celui qui est le souverain bien.
Remplie d'une soumission filiale envers ce Père universel qui est aux cieux, elle est prête à toutes ses volontés. Elle se résigne de cœur à toutes les dispositions de sa Providence. Sa foi est simple et vive. Elle se tient amoureusement soumise à l'Eglise, toujours prête à renoncer à ses idées les plus chères, si elles s'écartent en quelque chose de son enseignement ou de sa pratique, ayant une horreur instinctive de la nouveauté et de l'indépendance.
Ce dévouement à Dieu qu'inspire le don de Piété en unissant l'âme à son Créateur par l'affection filiale, l'unit d'une affection fraternelle à toutes les créatures, puisqu'elles sont l'œuvre de la puissance de Dieu et qu'elles sont à lui.
Une disposition de bienveillance envers toute créature
[...] Sa bienveillance pour ses frères est universelle. Son cœur est disposé au pardon des injures, au support des imperfections d'autrui, à l'excuse pour les torts du prochain. Il est compatissant pour le pauvre, empressé auprès de l'infirme.
Une douceur affectueuse révèle le fond de son cœur ; et dans ses rapports avec ses frères de la terre, on le voit toujours disposé à pleurer avec ceux qui pleurent, à se réjouir avec ceux qui sont dans la joie. Telle est, ô divin Esprit, la disposition de ceux qui cultivent le don de Piété que vous avez versé dans leurs âmes.
[...] Faites fructifier en nous un si précieux don ; ne permettez pas qu'il soit étouffé par l'amour de nous-mêmes.
Jésus nous a encouragés en nous disant que son Père céleste « fait lever son soleil sur les bons et sur les méchants» (S.Matth., v. 45); ne souffrez pas, divin Paraclet, qu'une si paternelle indulgence soit un exemple perdu pour nous, et daignez développer dans nos âmes ce germe de dévouement, de bienveillance et de compassion que vous y avez placé au moment où vous en preniez possession par le saint Baptême."
(Cf Les dons du Saint Esprit, Dom Prosper Guéranger, Ed. de Solesmes)