Chartres (28), la cathédrale


 

Émile Mâle définissait la cathédrale de Chartres comme « la pensée même du Moyen Age devenue visible ».  Notre-Dame de Chartres, classée au patrimoine mondial de l’UNESCOest l’aboutissement d’une longue histoire et de plusieurs cathédrales, qui se sont succédé, à cause des incendies successifs, en 1134, puis en 1194. Elle est l’objet de nombreux pèlerinages, très anciens, qui se sont développés notamment  avec la vénération de la sainte tunique de la Vierge, offerte à Chartres en 876 par Charles le Chauve. Elle offre aux visiteurs une véritable Bible en images, la possibilité de vénérer la sainte tunique de la Vierge, celle qu’elle portait au moment de l’Annonciation, de prier la Vierge du pilier, que le poète Charles Péguy a si bien célébrée, d’admirer les chefs-d’œuvre de l’iconographie médiévale, restaurés récemment…

 

***

 

 Un peu d’histoire

Atricum (le nom de Chartres) était autrefois la capitale des Carnutes, et, à l’époque gauloise, le plus puissant centre du culte druidique. La cathédrale actuelle est l’aboutissement d’une longue histoire : le premier évêque de Chartres s’appelait Adventus et vivait au IVe siècle, et la première église date sans doute de cette époque. Des cathédrales qui ont précédé celle d’aujourd’hui, sont conservées deux cryptes, dont la crypte dite de Saint-Fulbert, évêque de Chartres du XIe siècle, qui entreprit de reconstruire la cathédrale après l’un des incendies. Cette crypte est la plus vaste de France et l’une des plus importantes du monde,  et forme toujours les fondations de la cathédrale gothique actuelle.

C’est au XIIe siècle que s’ouvre l’histoire de l’actuelle cathédrale, et c’est par cette façade du XIIe siècle, appelée portail royal, que la cathédrale se présente aux visiteurs. Sa construction suscita en son temps l’enthousiasme des foules et des milliers de fidèles, venus de partout, y participèrent.

La cérémonie de la dédicace de la cathédrale actuelle eut lieu en 1260, en présence de saint Louis, qui passa par le portail royal, ultime chef-d’œuvre de l’art roman. Il offrit à cette occasion la rose Nord, dédiée aux rois d’Israël, sous laquelle il est représenté, dans une lancette, sous les traits de Salomon[1].

Une cathédrale mariale

La Vierge Marie est représentée 173 fois, et c’est notamment la vertu de Sagesse de Marie qui est exaltée. Marie, en ce lieu, nous présente son fils. La cathédrale tout entière célèbre l'incarnation.

Les représentations les plus célèbres sont celles de Notre Dame de Sous-Terre dans la crypte[2] ; La Vierge du Pilier, très populaire, en lien direct avec l’apparition de saint Jacques à Saragosse ; Notre Dame de la Belle Verrière, l’un des rares vitraux du XIIe siècle, qui gardent mémoire du fameux « bleu de Chartres » , mais aussi le vitrail des Miracles de Notre-Dame, datant du XIIIe siècle, sur lequel sont représentés les deux évêques Fulbert et Yves de Chartres[3]... Les verrières s’étendent d’ailleurs sur plus de 2.500 m2, constituant ainsi l’ensemble le plus vaste légué par le Moyen Âge[4].

Un lieu de brassage...

Certains visiteurs se rendent à Chartres pour une brève visite touristique, d'autres pour parcourir pied nus les lignes du grand labyrinthe[5], d'autres pour confier une prière à Notre Dame du pilier, d’autres pour admirer les merveilles des sculptures, des vitraux ...Quels que soient leur projet de visite, ils sont éblouis par cette cathédrale, joyau de l’architecture gothique.

Les pèlerinages

Les pèlerinages les plus importants sont ceux des étudiants, qui parcourent à pied une longue distance;  ceux des Tamouls de France (chrétiens ou non) qui viennent défiler longuement devant la vierge du Pilier et y déposer des brassées de cierges ; ceux des traditionalistes. Le pèlerinage effectué par Charles Péguy en 1912, à la suite d’un vœu fait l’été précédent au chevet de son fils malade, puis en 1913, a été immortalisé dans ses écrits, et appartient à l’histoire du pèlerinage de Chartres.[6] Il a écrit à son ami Joseph Lotte : « J'ai fait un pèlerinage à Chartres. Je suis Beauceron, Chartres est ma cathédrale;  Notre Dame m'a sauvé du désespoir ».

La restauration de la cathédrale

Une campagne de restauration de la cathédrale, qui a débuté en 1994, a permis de redécouvrir le décor intérieur tel qu’il fut conçu au XIIIe siècle, de restaurer  les vitraux, la chapelle Saint-Piat et le trésor, mais aussi la  clôture de chœur, communément appelé à Chartres le ‘Tour de Chœur‘, mur de pierre richement ouvragé et garni de scènes sculptées, qui s’élève à plus de 6 m de haut sur une centaine de mètres de long, et qui a été édifié entre le XVIe et le XVIIIe siècle[7]. Son programme iconographique est conçu comme une véritable bande dessinée : en 37 scènes, il résume la vie de Marie et de Jésus, pour se terminer au nord dans l’apothéose du couronnement de Marie au ciel par la Sainte Trinité : Père, Fils et Esprit…

Le millénaire de la crypte (2024): un jubilé

En 1024, l’évêque Fulbert de Chartres écrit au duc d’Aquitaine Guillaume V, lui indiquant l’achèvement des travaux de la crypte. Cette crypte forme toujours les fondations de la cathédrale gothique actuelle. Pour célébrer ce millénaire d’histoire, de pèlerinages, d’art, de musique sacrée, de dévotion, de liturgie, Mgr Christory, évêque de Chartres, a décrété une année jubilaire du 8 septembre 2024 au 15 août 2025[8].

 

Découvrons les trésors de la cathédrale Notre-Dame de Chartres…

Source: 

-Émile Mâle, Notre-Dame de Chartres. Paris : Flammarion, 1994.

-Site officiel de la cathédrale de Chartres.

 

[1] L’histoire de la cathédrale est d’ailleurs intimement liée à celle des rois de France : Henri IV, tout juste converti au catholicisme, y fut sacré Roi de France, en 1594, alors que Reims est aux mains de la Ligue catholique en pleine guerre de religions et que Paris s'oppose au sacre d’un souverain huguenot. Au XVIe siècle, les rois de France vinrent s’y recueillir : François Ier, Henri II et Henri III sont venus y prier. En 1793, la cathédrale est pillée et désaffectée par les révolutionnaires, pour en faire un “temple de la Raison”.

[2] avec ses riches allusions à l'histoire…

[3] Le Centre international du Vitrail de Chartres développe une application utilisant l’intelligente artificielle, gratuite et accessible à tous, qui racontera les vitraux et dévoilera leur sens. 

[4] Ils ont tous été réalisés entre 1180 et 1225, à l'exception de quelques réalisations plus tardives.

[5] Dans la nef, le célèbre labyrinthe- l’un des trois qui nous sont parvenus en France- a été réalisé en 1200  et manifeste aux yeux des pèlerins cette route longue et fastidieuse qui mène au Ciel.

[6] La spiritualité du pèlerinage de Chartres fut admirablement décrite par Charles Péguy .

[7] Entre le début en 1516 de la construction par Jehan de Beauce (maître-maçon, qui venait d’achever le clocher de la tour nord en style flamboyant) et la pose des statues de la dernière scène, sculptée en 1714, il s’est donc écoulé deux siècles.

[8] Une démarche particulière a été  proposée à tous et une indulgence plénière concédée pour l’occasion.

 

***

Pour en savoir plus

 

-sur Chartres : grand site marial au XII° siècle, dans l’Encyclopédie mariale

-sur Chartres : Marie et les verrières, vitraux, rosaces, dans l’Encyclopédie mariale

-sur Chartres : des proportions évoquant l’Incarnation, dans l’Encyclopédie mariale

-sur Chartres : les statues de la Vierge Marie, dans l’Encyclopédie mariale

-sur les cathédrales : l’esprit de la construction, dans l’Encyclopédie mariale

-sur Fulbert de Chartres, dans l’Encyclopédie mariale

-sur les reliques vestimentaires de la Vierge Marie, dans l’Encyclopédie mariale

-sur l'art des cathédrales et Marie, dans l’Encyclopédie mariale

 

Isabelle Rolland.