La liturgie du Jeudi Saint commence par évoquer l'agneau pascal immolé avant la sortie d'Egypte et la traversée de la mer rouge.
Ce rappel de l'Exode donne tout son sens à l'immolation du Christ.
La Passion n'est pas un simple supplice, une simple exécution après un faux procès, ce n'est pas un malheureux destin.
Il s'agit d'un sacrifice pascal, d'un Exode, d'un passage.
Le sacrifice de Jésus, nouvel Agneau pascal protège le peuple entier et lui donne de sortir de l'esclavage, non plus l'esclavage égyptien mais l'esclavage de Satan et de ses séductions.
Il s'agit de traverser non plus la mer rouge mais la mort, pour passer à la vie éternelle et à la Résurrection.
Plus encore que Myriam auprès de Moïse, la mère de Jésus est celle qui épouse parfaitement ce mouvement pascal.
Avec Marie, immaculée, nous passerons sans retard du vendredi au dimanche, de la croix à la résurrection, de la tristesse à la joie, de la mort à la vie (c'est la tradition du samedi marial).
Ensuite, la liturgie du Jeudi Saint commémore deux gestes de Jésus pendant la dernière Cène, le soir où il fut livré :
L'institution de la Eucharistie.
"Le Seigneur Jésus, la nuit où il était livré, prit du pain et, après avoir rendu grâce, le rompit et dit: "Ceci est mon corps, qui est pour vous; faites ceci en mémoire de moi." De même, après le repas, il prit la coupe, en disant: "Cette coupe est la nouvelle Alliance en mon sang; chaque fois que vous en boirez, faites-le en mémoire de moi." Chaque fois en effet que vous mangez ce pain et que vous buvez cette coupe, vous annoncez la mort du Seigneur, jusqu'à ce qu'il vienne." (1Corinthiens 11, 23-26)
Le lavement des pieds.
"Avant la fête de la Pâque, Jésus, sachant que son heure était venue de passer de ce monde vers le Père, ayant aimé les siens qui étaient dans le monde, les aima jusqu'à la fin. Au cours d'un repas, alors que déjà le diable avait mis au coeur de Judas Iscariote, fils de Simon, le dessein de le livrer, sachant que le Père lui avait tout remis entre les mains et qu'il était venu de Dieu et qu'il s'en allait vers Dieu, il se lève de table, dépose ses vêtements, et prenant un linge, il s'en ceignit. Puis il met de l'eau dans un bassin et il commença à laver les pieds des disciples et à les essuyer avec le linge dont il était ceint." (Jean 13, 1-5), etc.
Marie est présente à travers les hymnes :
Ces textes bibliques de la Messe montrent le Christ qui d'une part se fait le serviteur de chacun, et le Christ et qui, d'autre part, nous donne son corps, son sang, c'est à dire sa vie, son âme et sa divinité.
Comment ne pas penser alors aussi à Marie, "servante du Seigneur" (Lc 1, 28) et qui donna à Jésus son corps ?
C'est pourquoi, en complément des textes bibliques, dans l'Eglise latine, les hymnes du Jeudi saint font mémoire de Marie.
- L’hymne qui accompagne le « déposition » du pain consacré à la fin de la Messe fait mention du rapport intime entre l'Eucharistie et Marie: « Fructus ventris generosi... nobis natus ex intacta Virgine. »
- L’hymne « Ave, verum corpus, natum de Maria Virgine », composé au XIV° siècle, et qui a traversé les siècles.
Ces hymnes se sont nourris d'une longue tradition des pères de l'Eglise :
En Orient :
Saint Ephrem : « Marie nous a donné le pain qui réconforte à la place du pain qui fatigue que nous avait donné Eve ».
In P. YOUSIF, L'Eucharistie chez saint Ephrem de Nisibe, OChrA 224, Roma 1984, p.345.
Saint Pierre Chrisologue : Le Christ "lui-même est le pain qui, semé dans la Vierge, levé dans la chair, pétri dans la Passion, cuit dans la fournaise du sépulcre, mis en réserve dans l'Eglise, apporté aux autels, fournit chaque jour aux fidèles une nourriture céleste".
(S. Pierre Chrysologue, serm. 71, cité dans CEC 2837)
Photius : « La célébration du sacrifice volontaire du Christ est certainement un honneur rendu à la mère ».
(Homélie sur la Nativité 11)
En Occident :
Pseudo saint Augustin : « La chair du Christ est la chair de Marie ».
(Formule du Pseudo saint Augustin qui est en réalité saint Ambroise d’Aupert (+ 781).
Saint Bernard : « Le Fils est avec toi pour préparer l’admirable sacrement (Eucharistique)».
(Sermon 34)
F. Breynaert