Parmi tous les titres attribués à la Vierge tout au long des siècles par l'amour filial des chrétiens, il en est un qui a un sens très profond : « Virgo fidelis », la Vierge fidèle. Que signifie cette fidélité de Marie ? Quelles sont ses dimensions ?
La première dimension, c'est la recherche.
Marie a été fidèle avant tout lorsque, avec amour, elle s'est mise à chercher le sens profond du plan de Dieu sur elle et sur le monde : « Comment cela peut-il se faire ? », demande-t-elle à l'ange de l'Annonciation. Déjà dans l'Ancien Testament, le sens de cette recherche se traduit en une expression d'une rare beauté et d'une extraordinaire densité spirituelle : « Chercher le visage du Seigneur. »
Il n'y a pas de fidélité s'il n'y a pas, à la racine, cette recherche ardente, patiente et généreuse ; s'il n'y a pas dans le cœur de l'homme une question à laquelle seul Dieu peut apporter une réponse, ou plutôt dont Dieu seul est la réponse.
La seconde dimension de la fidélité, c'est l'accueil, l'acceptation.
Sur les lèvres de Marie, le « quomodo fiet ? » (comment cela peut-il se faire ?) se transforme en « fiat » : qu'il en soit ainsi, je suis prête, j'accepte. C'est le moment crucial de la fidélité, le moment où l'homme prend conscience que jamais il ne comprendra totalement le « comment » ; que dans le plan de Dieu, il y a davantage de zones de mystère que de zones d'évidence ; que malgré tous ses efforts, jamais il n'arrivera à tout saisir.
C'est alors que l'homme accepte le mystère, qu'il lui fait une place dans son cœur comme Marie, qui « retenait tous ces événements et les méditait dans son cœur » (Lc 2, 19 ; cf. Lc, 3, 15).
C'est le moment où l'homme s'abandonne au mystère, non avec la résignation de quelqu'un qui capitule devant une énigme ou une absurdité, mais avec la disponibilité de quelqu'un qui s'ouvre pour être habité par quelque chose - ou plutôt par quelqu'un - qui est plus grand que son cœur. Cette acceptation se fait en définitive par la foi, qui est adhésion de tout l'être au mystère qui se révèle.
La troisième dimension de la fidélité, c'est la cohérence.
Vivre en accord avec ce que l'on croit ; ajuster sa vie à l'objet de son adhésion ; accepter les incompréhensions, les persécutions, plutôt que de permettre qu'il y ait rupture entre ce que l'on vit et ce que l'on croit. C'est cela la cohérence. Peut-être sommes-nous là au cœur de la fidélité.
Mais toute fidélité doit passer par une épreuve très exigeante : la durée.
Et c'est pourquoi la quatrième dimension de la fidélité, c'est la constance. Il est facile d'être cohérent un jour, ou quelques jours. Il est difficile et important de l'être toute la vie. Il est facile d'être cohérent à l'heure de l'exaltation ; il est difficile de l'être à l'heure de l'épreuve.
Seule peut être dite fidèle une cohérence qui dure toute la vie.
Le « Fiat » de Marie à l'Annonciation trouve sa plénitude dans le « Fiat » silencieux qu'elle redit au pied de la croix.
Être fidèle, c'est ne pas trahir dans les ténèbres ce que l'on a accepté en public.
Jean Paul II, homélie à Mexico (Mexique), Vendredi 26 janvier 1979