La Vierge Marie a soutenu la persévérance des premiers ermites.
L'ordre des Chartreux est un ordre d'ermites fondé en 1089 par saint Bruno dans la région de Grenoble (France).
Six après, saint Bruno est appelé auprès du pape, et l'évêque protecteur des Chartreux, saint Hugues, s'attardait deux ans en Italie. De mauvais moines des alentours en profitèrent pour molester les ermites... Et les ermites étaient tentés de partir...
Alors intervint un saint vieillard - saint Pierre dira-t-on ensuite - qui leur dit :
« La Bienheureuse Vierge Marie assurera votre persévérance si vous récitez chaque jour ses heures... ».
Marie, la bien-aimée qui monte du désert, est le modèle des ermites.
Au XVII° siècle, Dom Innocent Le Masson, Général de l'Ordre de 1675 à 1703 paraphrase ces passages du Cantique des Cantiques :
« Qui est celle-là qui monte du désert, comme une petite fumée de myrrhe et d'encens et de toutes les poudres de senteur ? Qui est celle-ci qui monte du désert, comblée de délices et appuyée sur son bien-aimé? » (Cantique 3, 6 et 8, 5)
Dom Innocent écrit : « Remarquez que c'est du désert qu'on voit monter en triomphe la céleste Marie ; ce qui nous fait connaître que le monde a toujours été un désert pour elle jusqu'à la mort, et que ni le triomphe, ni les trophées de la résurrection de son Fils... n'ont été capables de la retirer de son désert, de sa vie cachée, humble modeste, séparée du commerce du monde, où elle ne vivait que de la contemplation des choses divines, ou, pour mieux dire, elle ne vivait point, mais c'était Dieu qui vivait en elle. »
Il ajoute : « Nous courrons après l'odeur de vos parfums », c'est-à-dire que nous imiterons l'exemple de votre vie... Les règles de notre profession et l'esprit de notre institut nous y engage.
Les ermites vivent avec Marie pour mère.
Dom Jean Gerecht (†1539) écrivait à un jeune confrère :
« Nos pères l'ont choisi pour mère... Pour mieux dire, elle ne nous a pas choisis pour serviteurs, mais pour fils ; ni pour gens qu'elle se contente de protéger ou de défendre, mais comme ses enfants qu'elle veut presser contre son cœur, garder et nourrir... »
Dom Jean Gerecht (†1539), Dom Léon le Vasseur (†1693) et tant d'autres ont voulu rejoindre le Christ dans sa dépendance à l'égard de Marie, et ils ont pratiqué le saint esclavage que saint Louis-Marie Grignion de Montfort devait populariser.
Jean Gerecht priait ainsi : « O très pieuse Mère de Dieu, rendez-moi entièrement conforme au bon plaisir de votre Fils, afin que je sois tout vôtre, et vous toute mienne. »
Dévotions :
- L'habitation d'un chartreux comporte deux pièces. Chaque fois que l'on entre, on salut la Vierge par un Ave Maria.
- L'Angélus est habituellement récité quatre fois par 24 heures, dans la solitude de l'oratoire.
- Trois Chartreux ont joué un rôle important à l'époque de la formation du rosaire :
Dom Henri Egher de Kalgar (†1408), instruit par la Vierge dans une vision, a élaboré une méthode de prière avec 5 Pater pour partager 50 Ave ; puis 15 Pater pour partager 150 Ave, soit autant que de Psaumes dans le Psautier, c'est « le Psautier de la Vierge ».
Peu après, Dominique Hélion (†1460), à la chartreuse de saint Alban près de Trèves (Prusse), introduisit des clausules, c'est-à-dire une phrase de méditation évangélique, à la fin de chaque Ave. Les clausules constituent des tableaux de la vie de Jésus et de sa mère, y compris les principaux faits du ministère public de Jésus.
Un autre Chartreux, Dom Aldophe, commença à rendre populaire cette pratique.
N.B. Rendre populaire le Rosaire fut surtout l'œuvre d'Alain de la Roche, un Dominicain, et des autres Dominicains après lui.
Extraits ou résumé par Françoise Breynaert de : Dom Yves GOURDEL, Le culte de la très Vierge dans l'ordre Chartreux, dans Hubert du Manoir, Maria, tome 2, Beauchêne, Paris 1952, p. 627-678