L'homélie du patriarche de Jérusalem saint Modeste († 634) sur l’Assomption de la Vierge Marie est particulièrement remarquable: la doctrine qu’elle développe sur l’Assomption fut en effet une étape très importante pour l’établissement du dogme de l’Assomption, dogme qui a été défini beaucoup plus tardivement, en 1950, par le pape Pie XII.
Patriarche de Jérusalem, saint Modeste connut la destruction de la Ville Sainte par les Perses en 614 : celle-ci fut pillée et brûlée. Le patriarche Zacharie et des milliers de chrétiens furent alors envoyés en exil vers la Perse, ainsi que la relique de Vraie Croix. Saint Modeste, qui était resté sur place, s’employa à ensevelir les très nombreux morts, à restaurer les Lieux Saints, et à aider les pauvres, grâce à l’aide généreuse du patriarche d’Alexandrie. Après 15 années passées en exil, le patriarche Zacharie revint. Saint Modeste resta près de Zacharie et lui succéda après sa mort, en 629. Saint Modeste fut enterré dans la basilique du Pater Noster, au pied du mont des Oliviers.
Au moment où fut écrite par saint Modeste de Jérusalem l’homélie sur l’Assomption, il est probable que la fête mariale du 15 Août à Jérusalem se soit transformée en une célébration de la fin de l’existence terrestre de Marie. L’homélie est donc une "louange": elle entend louer et exalter la bienheureuse Vierge Marie , en promouvant la fête liturgique de sa Dormition.
L’attribution de l’homélie à saint Modeste de Jérusalem n’est pas certaine, mais elle est très probable.
Cette homélie est le plus ancien texte contenant la doctrine de l’Église sur la vérité de l’Assomption de la Vierge Marie dans son âme et dans son corps.
Le magistère s’est intéressé à cette doctrine: Pie XII dans la bulle Munificentissimus Deus en cite un passage, en l’attribuant à un ancien auteur inconnu ; Vatican II, d’autre part, dans Lumen Gentium[1], s’y réfère et l‘authentifie comme œuvre de Modeste de Jérusalem
Saint Modeste de Jérusalem explique que la mort de la Vierge Marie advint à Jérusalem, sur le Mont Sion. Le fait arriva au milieu des anges, descendus du ciel mais restés invisibles, pour contempler la beauté, la grandeur et la sainteté de la Mère du Seigneur et veiller sur les derniers instants de sa vie terrestre. Les apôtres arrivèrent aussi, Dieu seul sait comment. Marie, en mourant, remit son âme directement dans les mains du Fils. Modeste pose une question, à laquelle il répond: Pourquoi la Vierge Marie meurt-elle ? Réponse : Marie devait suivre l’exemple de son Fils, pour lui être semblable. Modeste affirme que Jésus lui-même indiqua aux apôtres le jardin de Gethsémani comme endroit de la sépulture pour sa Mère.
Modeste affirme que le corps virginal de Marie n’a pas connu la corruption, et que c’est le Fils lui-même qui l’a ressuscitée :
« C’est pourquoi, en sa qualité de Mère toute glorieuse du Christ Sauveur, notre Dieu, donneur de la vie et de l’immortalité, Marie est vivifiée par lui ; elle est pour toujours con-corporelle dans l’incorruptibilité. C’est lui qui l’a ressuscitée du sépulcre et l’a prise avec lui d’une manière que lui seul connaît »
Ce texte bref nous éclaire aussi sur la nature des raisons de la glorification de Marie. Il s’agit de raisons essentiellement théologiques : la maternité divine, la virginité ("toute glorieuse ") et la conformité avec le Fils.
Saint Modeste considère le rôle de Marie comme médiatrice ou avocate au service des hommes comme le but du mystère de l’Assomption. Il s’adresse ainsi à la Vierge Marie :
« Dieu préserve vraiment de toute affliction ceux qui reconnaissent Marie Mère de Dieu : il T’a emmené près de lui pour que Tu puisses intercéder pour nous »
Et, plus loin :
« [Dieu] a décidé de Te prendre près de lui, pour que par Tes prières, Il Se montrât toujours favorable au monde entier. »
Sources:
-Testi Mariani del Primo Millennio, vol. II, Roma 1989, pp. 121-137
-D. BERETTO, « San Modesto di Gerusalemme, dottore dell’Assunzione », in Mater Ecclesiae 8 (1972),pp.154- 162.
-M. JUGIE, « La mort et l’Assomption de la Vierge: étude historico-doctrinale », In : Studi e Testi 114. Città del Vaticano : 1944, pp. 215-218 ;
-M. JUGIE, « Deux homélies patristiques pseudépigraphes », in : Échos d’Orient 39 (1940- 1942), pp.283-289.
Sur l’Assomption de la Vierge Marie au ciel, dans l’Encyclopédie mariale
Sur le dogme de l’Assomption défini par l’Église catholique, dans l’Encyclopédie mariale
Sur les étapes de la doctrine de l’Assomption, dans l’Encyclopédie mariale
Sur la proclamation du dogme de l’Assomption par Pie XII (Constitution apostolique "Munificentissimus Deus"), définissant le dogme de l'Assomption, le 1er novembre 1950, dans l’Encyclopédie mariale