Le vendredi 2 décembre, il y a trois apparitions dans la même soirée et quelqu'un a suggéré à Albert de demander son nom à l'apparition.
Vers 18h 30, les enfants viennent au lieu habituel et l'aperçoivent derrière la grille. Ils tombent à genoux comme un seul homme et récitent l'Ave Maria.
- Albert demande : "Êtes-vous la Vierge Immaculée ?"
- La Dame incline la tête en signe d'assentiment.
- Que nous demandez-vous ? reprend-il.
- D'être bien sages, répond-elle.
- Nous le serons, crie Fernande.
Quand, vers 20h 30, l'apparition revient, c'est encore Albert qui l'interpelle :
- Etes-vous bien la Vierge immaculée ?
- De nouveau, elle fait un signe de tête affirmatif.
- Que voulez-vous de nous ?
- Est-il vrai que vous serez toujours sages ?
- Oui, nous le serons toujours, dit l'enfant.
Peu après, un jeune homme s'attarde à fouiller les arbustes avec une lampe électrique. Albert revient en arrière et s'écrie « la revoilà ». Albert récite alors un Ave et annonce que la Vision lui a souri[1].
L'expression « Vierge Immaculée » est un joyeux message. Le mot « Vierge » évoque la stupeur devant la maternité divine et virginale de Marie. Le mot « Immaculée » rappelle sa sainteté, sa fidélité à la grâce. Ce sont deux mots de lumière. La lumière de l'apparition contraste avec la nuit de l'hiver. La Vierge Immaculée contraste avec la nuit du péché, péché de la guerre mondiale qui se prépare, nuit du matérialisme qui videra les églises, sans oublier la nuit de certains péchés spécifiques tels que les réseaux de pédophilie qui traumatiseront à la fin du XX° siècle la ville voisine de Charleroi. La Vierge Immaculée fait le don de sa présence, comme un sourire au cœur de la nuit qui menace.
Ce beau nom est donné pendant la neuvaine de l'Immaculée conception, fêtée le 8 décembre. Le 8 décembre fête la conception immaculée de Marie, sa venue à l'existence, sa sainteté en germe. Le nom « Vierge immaculée » décrit Marie pleinement épanouie dans la grâce qu'elle a reçue à l'aube de sa vie.
Aux enfants, il est demandé deux fois d'être sages.
Dans l'immédiat, pour les enfants, être sage signifiait ne pas pousser trop loin leurs farces - ce qui aurait compromis la transmission du message.
Mais il y a une insistance (deux fois) qui demande à être prise au sérieux.
- « Etre sage » a un sens spirituel profond. La petite Gilberte dira qu'elle a tout de suite compris qu'il s'agissait de vivre selon Dieu. Et comment en douter ? Ces paroles n'ont-elles pas été données dans une lumière céleste ? Etre sage, c'est vivre de Jésus que l'on appelle « la Sagesse éternelle et incarnée ». C'est vivre la Sagesse de l'Immaculée qui se laisse pétrir par l'Esprit Saint. C'est vivre la Sagesse de la croix qui est scandale ou folie quand on n'a pas la foi. C'est vivre la Sagesse comme don de l'Esprit Saint à la Pentecôte.
- « Etre sage » a un sens pour le contexte historique proche. Ce n'est pas seulement à des enfants et des adolescents (tout de même, la plus grande des voyantes va sur ses 16 ans) qu'il est dit d'être sage, c'est au monde entier, et en particulier à cette Europe qui sombre dans la folie des idéologies mortifères.
- « Etre sage » est une parole adressée à des jeunes, et le contexte philosophique lui donne un relief particulier. Au XIX° siècle, on a cru expliquer les comportements humains par l'inconscient. Il existe sans aucun doute des motivations qui restent inconscientes, mais les théories sont tombées dans la déraison[2] quand elles ont poussé les adultes à renoncer à l'exercice de l'autorité devant les jeunes. L'enfant aurait toujours raison et il faudrait laisser s'exprimer son inconscient. Autonomie totale de l'enfant, permissivité, refus de l'autorité, responsabilité parentale au moindre problème, ne pas frustrer, ne pas brider, ne pas sanctionner... En demandant à des enfants et à des adolescents d'être sages, la Vierge Immaculée corrige les germes d'une dérive qui cependant prendra une ampleur importante en Europe, comme nous le savons bien.
[1] Omer ENGLEBERT, Les apparitions de Beauraing, Paris 1933, p. 72
[2] Une déraison dont on commence à peine à peine... Cf. Didier PLEUX, Françoise Dolto, La déraison pure, Editions Autrement, Paris 2013.
Françoise Breynaert
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