Les conditions du dialogue inter-religieux (Jean Paul II en Tunisie)

Les conditions du dialogue inter-religieux (Jean Paul II en Tunisie)

De notre temps un développement important du dialogue entre musulmans et chrétiens a vu le jour. Pour les catholiques, le Concile Vatican II a constitué un pas décisif, les encourageant à s'ouvrir à ce dialogue et à la collaboration avec les musulmans. Le Concile exhortait chrétiens et musulmans, dans les termes bien connus de la Déclaration « Nostra Aetate », « à s'efforcer sincèrement à la compréhension mutuelle, ainsi qu'à protéger et à promouvoir ensemble, pour tous les hommes, la justice sociale, les valeurs morales, la paix et la liberté » (Nostra Aetate, 3).

Il faut rendre hommage à la Tunisie pour ses initiatives dans ce domaine, par exemple les colloques islamo-chrétiens organisés par le Centre d'études et de recherches économiques et sociales, la contribution de musulmans tunisiens et de chrétiens vivant en Tunisie, à divers groupes de recherche et de réflexion, dont les travaux sont appréciés. Et j'ai appris avec plaisir que des échanges académiques sont appelés à se développer entre la prestigieuse université de la Zaytouna et des universités pontificales à Rome.

Permettez-moi encore de réfléchir un instant avec vous sur les conditions nécessaires pour que ce dialogue soit fructueux.


Il est indispensable tout d'abord qu'il soit animé par un vrai désir de connaître l'autre.

II ne s'agit pas d'une simple curiosité humaine. L'ouverture à l'autre est, en quelque sorte, une réponse à Dieu qui permet nos différences et qui veut que nous nous connaissions plus profondément. Et pour cela, se situer en vérité les uns par rapport aux autres est une exigence essentielle.

Les partenaires du dialogue seront assurés et sereins dans la mesure où ils seront vraiment enracinés dans leurs religions respectives. Et cet enracinement permettra l'acceptation des différences et fera éviter deux écueils opposés : le syncrétisme et l'indifférentisme. Il permettra également de tirer profit du regard critique de l'autre sur la façon de formuler et de vivre sa foi.


La foi sera aussi à la base de cette forme de dialogue qu'est la collaboration au service de l'homme dont j'ai déjà parlé. Car du fait que nous croyons en Dieu Créateur, nous reconnaissons la dignité de chaque personne humaine créée par Lui. En Dieu nous avons notre origine et en Lui notre destinée commune. Entre ces deux pôles, nous sommes sur la route de l'histoire où nous devons cheminer fraternellement dans un esprit d'entraide, afin d'atteindre la fin transcendante que Dieu a établie pour nous. »

Je voudrais réitérer ici l'appel que je lançais lors de mon voyage au Sénégal: « Faisons ensemble un effort sincère pour arriver à une compréhension mutuelle plus profonde. Que notre collaboration en faveur de l'humanité, entreprise au nom de notre foi en Dieu, soit une bénédiction et un bienfait pour tout le peuple » (Sermon du 22 février 1992)


JEAN PAUL II

Jean Paul II, discours lors de la rencontre avec les représentants du monde politique, culturel et religieux. Palais présidentiel de Carthage, dimanche 14 avril 1996.