Joseph, après l'examen de majorité de Jésus au temple pour ses douze ans, devait être très admiratif de ce que Jésus avait montré aux docteurs de la Loi. Saint Luc confirme que ceux-ci, trois jours plus tard, continuaient à l'accepter parmi eux et étaient étonnés de son intelligence (Lc 2, 46 et 47).
La coutume étant que les Galiléens repartaient tous ensemble en caravane, Joseph et son épouse ne le surveillaient pas (Lc 2, 43), connaissant sa sagesse et son obéissance.
Joseph n'a pas fait d'erreur éducative, bien au contraire, il lui a laissé cette autonomie qui permet à un préadolescent de mûrir pour devenir, un jour, un véritable adulte, responsable de ses actes en toute circonstance.
L'autonomie c'est faire ce qu'on doit, comme on veut, à l'exception de ce qui est interdit. C'est bien ce que le Père a prévu pour l'être humain.
Aime ton Dieu et ton prochain, c'est ce que tu dois faire. Comme tu veux, c'est-à-dire en utilisant aux mieux tes dons, les charismes, les goûts que j'ai mis en toi et en les développant (d'où l'extraordinaire diversité des saints).
Quant aux interdits, au paradis terrestre, il n'y en avait qu'un : ne pas chercher à faire la connaissance et par suite l'expérience du mal. Le péché originel du premier couple humain a fait entrer le mal dans le monde ; de ce fait la loi mosaïque a formulé un certain nombre d'interdits bien connus : Tu ne tueras point, Tu ne voleras point etc. etc. Ces interdits sont d'ordre moral et Joseph savait bien que Jésus ne les transgresserait jamais. Mais il avait reçu la mission « d'élever » son fils, c'est-à-dire de lui permettre de développer les talents de son humaine nature et parallèlement de lui ouvrir la voie de l'intégration dans la vie sociale, qu'elle soit à connotation civique ou religieuse. Il l'a fait comme le grand juste qu'il était: par l'exemple. [...]
Ce qui le rapproche le plus d'un patronage des pères éducateurs, c'est qu'il est également le patron des jeunes époux, car avant d'être un bon père éducateur, il convient d'être un bon époux. L'amour mutuel des époux, le partage qu'ils font entre autorité de gouvernement et autorité spirituelle, celle qui se passe de pouvoirs, leur nécessaire complicité, si bien exprimée par Marie (ton père et moi te cherchions tout angoissés...), tout cela favorise l'émergence d'une bonne éducation familiale.
Extraits de : Y. Bonnet, « Saint Joseph éducateur », dans : CFRDJ, Actes du premier symposium « Saint Joseph », Cotignac, 7-8 juin 2008. Editons du CFRDJ, Allex, 2008, p.85-89
Il s'y explique en 3 domaines comprenant chacun 3 sous-domaines :
1) La socialisation pour le temps de la petite-enfance (0-6 ans), cela passe par :
a. La loi : la donner et la faire respecter.
b. Le respect : la politesse (« dis bonjour à la dame ! »). Tout être humain mérite le respect, et ce, même s'il a des comportements intolérables : apprendre à dissocier l'Être et le Faire (ou l' Avoir).
c. Le service mutuel : mettre la table, ranger sa chambre,...
2) La fortification pour le temps de l'enfance (6-11 ans)
a. La confiance en soi : l'aider à construire et à consolider son Moi, sa personnalité. Un compliment ou encouragement venant du père a beaucoup plus de poids !
b. La capacité à prendre des risques : en l'aidant à peser la rationalité. Car la maman n'aime pas les risques pour ce petit rejeton !!
c. Ces deux points conduisent naturellement à l'autonomie. Attention, ce n'est pas l'indépendance, ça n'a rien à voir.
3) La finalisation pour le temps de l'adolescence, phase délicate et qui peut durer longtemps... Le but étant de construire la « fusée à 3 étages du bonheur », qui est ce pour quoi l'homme est fait, le sens de la vie .
Attention : du bonheur et pas du plaisir !
a. Étage 1 : le travail.
Il donne du sens, il permet de développer une dimension créative, mais il faut d'abord être capable de travail répétitif, structurant, et donc fastidieux.
b. Étage 2 : l'amour (et les amitiés vraies)
donne également du sens à la vie. Il permet d'accueillir l'autre tel qu'il est.
c. Étage 3 : Dieu.
Il donne sens à la vie car il donne sens à la mort.
Quel programme ! Cela peut paraître colossal mais le Père Yannik Bonnet termine en nous rassurant : "Nous avons une obligation de moyens, pas de résultats !"