L'erreur millénariste imagine un règne de Dieu et des croyants sur la terre, d'une manière qui en réalité ne peut se réaliser qu'au-delà des limites de ce monde ci.
C'est une idée relativement répandue...
Les témoins de Jéhovah rêvent d'un paradis terrestre, les raeliens rêvent d'une immortalité par le clonage, le marxisme et de nombreux messianismes politiques pensent établir un « royaume » et tout cela ne donne que des oppressions humaines.
Cette erreur est importante à éviter, c'est une imposture qui conduit, à petite échelle, à des dérives sectaires et, à grande échelle, à des idéologies totalitaires.
Le magistère rejette le « millénarisme »:
« Cette imposture anti-christique se dessine déjà dans le monde chaque fois que l'on prétend accomplir dans l'histoire l'espérance messianique qui ne peut s'achever qu'au-delà d'elle à travers le jugement eschatologique: même sous sa forme mitigée, l'Eglise a rejeté cette falsification du Royaume à venir sous le nom de millénarisme surtout sous la forme politique d'un messianisme sécularisé, "intrinsèquement perverse".»
(Catéchisme de l'Eglise catholique § 676)
L'allusion de la dernière phrase porte sur une réponse donnée par le Saint-Office le 21 juillet 1944 :
"Ne peut être enseigné comme une chose certaine le système du millénarisme mitigé à savoir que le Christ Seigneur viendra pour régner en cette terre-ci visiblement avant le jugement final, que la résurrection de plusieurs justes le précède ou non" (cf. DS n°3839).
Ce qui est condamné porte sur l'aspect visible de ce règne, comme si Jésus devait redescendre sur terre ou comme si un roi-messie (un anti-Christ) ou un système devait l'incarner.
Le Catéchisme de l'Eglise catholique enseigne plus ce qu'il ne faut pas croire que ce qu'il y aurait à croire. C'est pourquoi il est utile de compléter le catéchisme par la lecture des pères de l'Eglise et des saints.
Saint Irénée, saint Augustin et saint Louis-Marie de Montfort ont des accents différents mais ils ne sont pas millénaristes.
- Saint Irénée enseigne que le règne des saints n'adviendra qu'après la résurrection des justes[1].
- Saint Augustin enseigne qu'il s'agit tout simplement du règne de l'Eglise, car Jésus a dit : « le Prince de ce monde est jugé » (Jn 16, 11). Saint Augustin qui appelle l'Eglise « royaume », mais il dit aussi que les chrétiens ne règnent pas comme ils règneront dans l'au-delà et qu'il y aura de l'ivraie dans l'Eglise jusqu'à la fin du monde.[2]
- Saint Louis-Marie de Montfort se situe dans la ligne de saint Augustin : Marie sera mieux connue, elle éclatera en miséricorde, en force et en grâce (VD 50), la vraie dévotion ouvrira un siècle de Marie (VD 217), il nous faut donc désirer ce triomphe de la vérité et de l'amour ; mais il faut aussi savoir que les persécutions s'amplifieront jusqu'à la fin (VD 52)[3].
[1] Saint Irénée, Contre les hérésies livre V, 25-36
[2] Saint Augustin, La Cité de Dieu, livre IX
[3] VD : Saint Louis-Marie de Montfort, Traité de la vraie dévotion.
F. Breynaert