L’événement de l’Annonciation, grande fête dans la liturgie du 25 mars, est très représenté dans l’iconographie. Selon les styles et les époques, les représentations en sont plus ou moins dépouillées.
« Aujourd'hui commence à poindre l'aurore de notre salut, et se manifeste le mystère éternel. Car le Fils de Dieu devient Fils de la Vierge, et Gabriel annonce cette grâce. Avec l'Ange, disons donc à la Mère de Dieu : Réjouis-toi, pleine de grâces, le Seigneur est avec toi. » (Tropaire de l'Annonciation).
Les icônes représentent, de façon plus ou moins symbolique et plus ou moins manifeste, les deux événements concomitants de l’Annonciation et de l’Incarnation.
On distingue dans le récit évangélique cinq phases que l'on retrouvera dans les représentations artistiques de l’Annonciation :
-salutatio : l’entrée de l’ange entre et la salutation à Marie ;
-conturbatio : le trouble de Marie ;
-annuntiatio : l’annonce à Marie de sa maternité divine ;
-quomodo : en réponse à la question de Marie, la façon dont cela arrivera ;
-acceptatio : le consentement de Marie à la proposition divine.
À ces cinq phases correspondent trois phases de dialogue :
– La salutation de l’Archange
– L’annonce à Marie, son questionnement et la réponse de l’Archange
– Le consentement de la Vierge Marie et l’accomplissement de l’Incarnation.
Le langage propre de l’icône permet de figurer, voire de symboliser ces différents temps.
Ainsi, l’Ange, auréolé, est représenté en mouvement, ailes déployées, tenant en sa main gauche un bâton, symbole du messager. Le geste de sa main droite bénit la Vierge Marie. Les couleurs de son vêtement diffèrent, selon que l’on veut symboliser, mais il est souvent revêtu de tons lumineux. Son geste de bénédiction symbolise également le dialogue.
La Vierge Marie est représentée soit debout devant un trône, soit assise sur le trône avec un ou deux coussins. Elle tient parfois à la main la quenouille de fil pourpre qu’elle était en train de filer à l’arrivée de l’Archange pour tisser le voile du Temple. Parfois, la Vierge est parfois représentée debout, allant chercher de l'eau au puits qui occupe le centre de l'icône, conformément au récit de l’évangile apocryphe intitulé Protévangile de Jacques (IIès), qui situe l’Annonciation en deux lieux : la première salutation de la Vierge Marie par l’Ange Gabriel alors que Marie était sortie pour puiser de l’eau ; la seconde à l’intérieur- Marie étant rentrée rapidement chez elle après la salutation- alors qu’elle file la pourpre :
« Or, elle prit sa cruche et sortit pour puiser de l’eau. Alors une voix retentit : « Réjouis-toi, pleine de grâce, le Seigneur est avec toi. Tu es bénie parmi les femmes ». Marie regardait à droite et à gauche : d’où venait donc cette voix ? Pleine de frayeur, elle rentra chez elle, posa sa cruche, reprit la pourpre, s’assit sur sa chaise et se remit à filer »[1]
Traditionnellement, elle porte une robe bleu foncé et un manteau rouge, orné des trois étoiles qui symbolisent Sa virginité perpétuelle (avant, pendant et après la naissance du Christ).
La tête de la Vierge Marie est inclinée sur son cœur et orientée vers l’ange, signe de son écoute. Ses oreilles sont à demi-cachées par son sous-voile, symbole d’une écoute prudente, à l’inverse d’Ève. Elle reçoit sur la tête un rayon venu du ciel, signe de son élection et de l’Incarnation.
Le bouleversement de la Vierge Marie peut être figuré par l’attitude de retrait du corps, parfois accompagné d’un geste de la main droite levée, les paumes tournées.
Dans la seconde partie du dialogue, (quomodo), l’Ange annonce à Marie la façon dont l’Incarnation se fera :
« L'Esprit Saint viendra sur toi et la puissance du très Haut te couvrira de son ombre ... » (Luc 1 : 34-35)
Cette présence de l’Esprit Saint est symbolisée par le voile rouge, drapé qui surplombe la scène et flotte dans les airs, comme la nuée.
Dans la troisième partie du dialogue (acceptatio),
Marie dit alors : « Je suis la servante du Seigneur. Qu'il m'advienne selon ta parole. » (Luc 1 : 36-39)
Ce consentement est figuré par l’attitude générale de la Vierge, marquée par une humilité rayonnante.
L’incarnation est figurée par le rayon lumineux descendant du ciel sur la Vierge Marie. Parfois il comporte une colombe, symbole de l’Esprit Saint agissant, et par le voile rouge flottant de l’Esprit Saint.
L’icône de l’Annonciation qui est la plus étonnante de ce point de vue est celle de l’Annonciation d’Oustioug, qui date du XIIès, où la Vierge annoncée porte déjà l’image de l’Enfant en son sein.
Icône de l’Annonciation d’Oustioug (détail) : la Vierge porte déjà l’Enfant en son sein. Domaine public, via Wikimedia Commons.
Les décors sont parfois très épurés, ou, au contraire, très présents dans la scène, selon les styles et les époques.
Parmi les représentations élaborées, on peut citer la célèbre icône de l'Annonciation de Saint Clément d'Ohrid, en Serbie, qui date du XIVè siècle, celle attribuée à Saint André Roublev, de 1405, placée sur l'iconostase de la Cathédrale de Moscou, et celle du Monastère de Stavronikita au Mont Athos, du XVIè siècle.
Sources :
- Gordana Babic, Icônes. Comptoir du livre, Paris 1986 (Belgrad 1980).
- Ephrem Yon, Philippe Sers éditeur. Les saintes icônes, une nouvelle interprétation, Paris 1990, p. 168.
-Élisabeth Hériard. « Schéma de l’icône de l’Annonciation », In : Revue Orthodoxes à Marseille.
sur les icônes de l’Annonciation d’Ohrid, dans l’Encyclopédie mariale
-Sur l’icône de l’Annonciation de saint André Roublev (XVès), dans l’Encyclopédie mariale
-sur l’icône de l’Annonciation de Tinos (Panaghia évanghelistria)
-sur l’icône de l’Annonciation d’Oustioug , dans l’Encyclopédie mariale
-sur l’icône de l’Annonciation du Monastère de Stavronikita (Mont Athos, XVIès), dans l’Encyclopédie mariale
www.mariedenazareth.com/index.php
- sur l’Annonciation dans le rite byzantin, dans l’Encyclopédie mariale
-sur l’Annonciation dans l’art, dans l’Encyclopédie mariale
Isabelle Rolland