La Vierge parturiente


 

Il existe différentes représentations de la Vierge enceinte (en latin ‘Maria grávida’) , notamment à partir du XIIIès, dans plusieurs types de figurations et techniques: sculptures , enluminures, vitraux, etc. Ces représentations précèdent, dans l’ordre chronologique des thèmes iconographiques liés à la vie de la Vierge Marie, celles de la Vierge à l’Enfant. Elles ont une portée théologique spécifique. La Vierge Marie est en effet la preuve vivante que la promesse messianique est réalisée dans l’histoire : cette figuration nous donne donc à voir la continuité du projet de Dieu, non seulement dans l’histoire du peuple d’Israël, tel qu’il est annoncé dans l’Ancien Testament, mais également dans notre histoire à tous, dans l’ensemble des Saintes Écritures et jusqu’à la fin des Temps. Nous entrons avec ce thème iconographique dans le mystère de l’un des Privilèges de Marie : sa maternité virginale. Elle nous donne également à voir la façon dont la Vierge Marie a vécu ce temps de l’attente.

 

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Les représentations de la Vierge Marie enceinte

Il existe plusieurs figurations ‘ historiques ‘, contextualisées, de la Vierge Marie enceinte : l’épisode de la Visitation, par exemple, est parfois traité en insistant sur la grossesse des deux femmes : parfois les deux enfants Jésus et Jean-Baptiste sont bel et bien représentés dans le ventre de leur mère respective, Marie et Élisabeth. Le voyage vers Bethléem est également un thème iconographique représentant la Vierge juste avant la naissance de Jésus. La contemplation de la Vierge Marie dans ce temps humain de gestation d’un enfant permet de réaliser ce qu’a vécu réellement la Vierge Marie. Les écrits d’A.C.Emmerich rapportent d’ailleurs combien le voyage vers Bethléem, où devait enfanter Marie, fut pénible.
A ces représentations historiques du temps de l’attente de la Vierge Marie s’ajoutent celles qui illustrent le fameux passage de l’Apocalypse : dans ces représentations apocalyptiques, la Vierge Marie est représentée avec un dragon à ses pieds (conformément au texte de l’Apocalypse :

1 Un grand signe apparut dans le ciel : une femme, vêtue du soleil, la lune sous les pieds, et sur la tête une couronne de douze étoiles. 2 Elle était enceinte et criait dans le travail et les douleurs de l’enfantement.
3 Alors un autre signe apparut dans le ciel : C’était un grand dragon rouge feu. Il avait sept têtes et dix cornes et, sur ses têtes, sept diadèmes. 4Sa queue, qui balayait le tiers des étoiles du ciel, les précipita sur la terre. Le dragon se posta devant la femme qui allait enfanter, afin de dévorer l’enfant dès sa naissance… ( Apocalypse 12,1-17)

Ces représentations, qu’elles soient historiques ou symboliques, nous permettent d’approcher quelque peu le mystère de la Maternité divine : l’expression de ‘Vierge enceinte’, bel oxymore, est un mystère impossible à concevoir dans l’ordre naturel de la logique purement humaine. Cette figuration nous aide donc à méditer sur ce miracle, ce privilège marial de la maternité virginale.
Ce privilège étant lié à celui de la Conception immaculée de Marie (conçue sans porter la trace du péché), il devint courant, au fil du temps, de représenter l’Immaculée Conception sous la forme d’une femme enceinte, figuration symbolique reliant ainsi le mystère de la Conception immaculée de Marie à celui de sa maternité divine.
Enfin, d’autres représentations insistent réellement sur le temps de l’attente, tel que l’a vécu la Vierge Marie.

 

La Vierge de l’attente ou Vierge de l’espérance

Il existe des représentations de l’attente de la Vierge Marie qui sont décontextualisées. Elles donnent lieu à des figurations nouvelles, plus libres : Vierge dialoguant avec les anges, lisant l’Écriture Sainte, etc.
Antonio Veneziano, dit Antonio le Vénitien, peintre italien actif à Sienne, Florence et Pise entre 1369 et 1380, élève de Taddeo Gaddi, nous offre une remarquable représentation de la Vierge parturiente : image d’une Vierge paisible, humble et patiente, vivant en plénitude ce temps d’espérance et de foi. Dégagé de toute contextualisation historique, le tableau nous offre une représentation symbolique, idéale pour vivre ce temps de l’attente que représente l’Avent.
La Vierge est représentée encadrée par deux Lys, symboles de pureté, mais également symboles du Christ et de Marie. Si le Lys a été longtemps le symbole végétal du Christ, il est devenu également celui de la Vierge Marie. La rhétorique propre de l’image l’affirme , de façon symbolique : il s’agit bien d’une maternité virginale. D’autre part, le Lys étant la fleur liée à l’Annonciation, portée par Gabriel, la représentation de ces deux Lys commémore l’événement qui a permis cette grâce. La Vierge est donc « l’Annoncée », celle qui a reçu le message de l’Ange. D’autre part, les deux Lys encadrant la Vierge Marie forment un jardin clos, et évoquent le thème de l’Hortus conclusus, propre à la Vierge. Enfin, les vases dans lesquels s’épanouissent les Lys rappellent les représentations, courantes à Sienne, depuis leur introduction par Duccio dans les Annonciations. La Vierge Marie contenant en elle-même le Christ est donc comparée à un vase très pur, un réceptacle. On retrouve cette image dans les litanies de Lorette, où la Vierge est comparée à un vase spirituel, un vase d’honneur, un vase insigne de dévotion.
D’autre part, la main droite de la Vierge, posée sur son ventre, rappelle le geste de la Vierge dite « Hodigitria (Ὁδηγήτρια), », celle qui montre le chemin. C’est donc bien une Vierge à l’Enfant qu’il s’agit, puisque Marie nous présente déjà l’Enfant caché en son sein. De la main gauche, elle tient un livre. Il n’est pas rare de trouver des représentations de la Vierge Marie lisant les Écritures : elles témoignent de sa parfaite connaissance des textes, mais également de sa docilité et de sa foi. Le geste associé des deux mains, qui simultanément montre l’Enfant de la main droite et les Écritures de la main gauche associe les deux événements : Celui que Marie porte est bien le Messie, annoncé dans les Écriture. La relation à l’icône est marquée par le fond doré, sans élément de décor inutile.
Enfin, la position assise de la Vierge, sur un simple coussin, la met en position de présentation et d’humilité. Elle-même est en retrait, comme au second plan, et elle nous présente en premier plan Celui qu’elle porte, dès avant sa naissance.
Cette remarquable représentation assemble donc trois thèmes iconographiques : une Vierge à l’Enfant, mère de Dieu (« Theotokos »)une Vierge dite d’humilité et une Vierge qui montre le chemin (Hodigitria) : celui de la parole de Dieu, et celui du verbe incarné, Parole faite chair.
Toutes ces représentations nous permettent également d’entrer dans l’attente de Noël avec celle qui porta l’Enfant Jésus en elle, jusqu’au terme de sa grossesse.

Une Vierge de l’Avent, qui conduit vers Noël

Nous sommes invités à entrer dans ce temps de l’Avent, où chacun s’habille le cœur, se prépare à recevoir sous son propre toit le Sauveur. La contemplation de cette Vierge parturiente nous aide à cheminer avec elle, à vivre la grâce spécifique de ce temps de l’Avent.

 

 

 

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Pour en savoir plus

 

-sur la virginité perpétuelle de la Vierge Marie, dans l’Encyclopédie mariale 

-sur la Vierge Hodigitria, dans l’Encyclopédie mariale 

 

Isabelle Rolland