Dans la version du secret écrite le 14 août 1853, Mélanie a écrit « Ici la Vierge me donna la règle, puis elle dit un autre secret sur la fin des temps ». Personne ne connaît donc encore tout le secret de la bergère. Il semble que cette dimension inédite comporte une très forte note d'espérance : l'Eglise et le monde entier connaîtront un printemps, un temps de triomphe, un temps de paix.
Le dialogue de Mélanie avec le curé de Diou nous en donne un aperçu.
Le curé de Diou, qui connaît Mélanie dans les dernières années de sa vie, a relevé les affirmations suivantes [1] :
« L'antéchrist publiera par toute la terre le jour qu'il s'élèvera au Ciel, et de partout les foules se rendront à Jérusalem. Il s'élèvera au milieu d'un pompeux cortège de faux anges de lumière. Déjà il sera haut et jouira des acclamations de ses millions de témoins et d'admirateurs ; lorsque saint Michel archange apparaîtra avec une armée d'anges d'une splendeur dans égale au cri de « qui est semblable à Dieu ? Quis ut Deus ? «
Instantanément les démons perdront leur éclat d'emprunt et leur force et s'écartement de l'Antéchrist qu'ils soutenaient par leur vertu. Un feu immense sort de la terre, entrouverte sous les pieds des spectateurs des premiers rangs, placés là, selon leur dignité et leur opulence ; ils sont, avec l'antichrist et les démons, engloutis dans ce vaste cratère, qui se referme sur eux.
Alors et aussitôt les Juifs se convertiront et seront des plus fidèles et des plus fervents chrétiens. Toute la terre sera catholique.
Jusqu'à la fin du monde les lois resteront chrétiennse, il n'y aura plus de persécution légale. Pendant un assez grand moment tous les hommes seront bons chrétiens, mais peu à peu ils recommenceront à se laisser aller à la tiédeur, puis à l'oubli de Dieu et enfin à de grands crimes. [...] Dieu poursuivra les hommes de sa colère. Les fléaux célestes seront épouvantables ; les eaux seront empoisonnées [...]
La venue du Christ sera soudaine... Tous les hommes mourront.
- Quelques-uns ne seront-ils pas réservés pour la rénovation ?
- La rénovation aura lieu, mais pas comme certains bons prêtres le croient ; tous les hommes sans exception mourront.
[...] »
Quelques remarques :
Mélanie parle ici de la chute de l'antichrist dans l'étang de feu, ce qui correspond à la vision du livre de l'Apocalypse où le faux prophète est jeté dans l'étang de feu (Ap 19, 20). Dans l'Apocalypse, cet évènement, qui n'est pas décrit avec autant de détails matériels, semble précéder immédiatement la mort de tous les hommes (Ap 19, 21) lors de la venue du Christ.
De même, dans la seconde lettre de saint Paul au Thessaloniciens, l'Impie (l'antichrist, le faux prophète) n'est pas anéanti par l'archange saint Michel plusieurs générations avant la fin du monde, mais directement par le Christ lors de son retour :
« Alors l'Impie se révélera, et le Seigneur le fera disparaître par le souffle de sa bouche, l'anéantira par la manifestation de sa Venue. » (2Th 2, 8)
Il faut donc « tirer » un peu les textes bibliques pour faire place à cette vision de Mélanie d'un certain temps entre la chute de l'antichrist et la mort de tous les hommes (cet autre Secret n'a d'ailleurs reçu aucune rédaction officielle ni aucun imprimatur).
En tout cas, Mélanie s'accorde avec le livre de l'Apocalypse pour dire que la restauration (Ap 20-21) n'advient qu'après la mort de tous les hommes (Ap 19, 21) : il n'y a pas de place pour le millénarisme, fut-il mitigé, conformément au récent catéchisme de l'Eglise catholique, § 676.
Retenons que cet "autre secret" insipire très fortement l'espérance.
Le voyant de l'Apocalypse s'étendait longuement sur l'espérance suscitée par la chute de Babylone (Ap 18), la voyante de la Salette s'étend sur l'espérance suscitée par la chute de l'Antichrist (Ap 19).
Ce sont des images différentes. Jusqu'à quel point faut-il prendre ces images à la lettre ?
[1] E. Combe, Le Secret de Mélanie et la crise actuelle, Jonquières et Dati, Rome 1906, p. 138-139, cité dans René LAURENTIN, Michel CORTEVILLE, Découverte du Secret de la Salette, Fayard, 2002, p. 70-71
Synthèse F. Breynaert