Un peu d'histoire :
Au Moyen-âge, les lignées de roi, ou les tableaux montrant les liens de consanguinité ne s'appelaient pas « arbre » généalogique, ils avaient une forme rectangulaire, triangulaire, circulaire, etc. Ils n'étaient pas toujours décorés de motifs végétaux, et, quand il y avait quelques palmes ou quelques fleurs, cela ne faisait pas un arbre. L'arbre de Jessé est donc une représentation originale qu'il faut rapprocher de « l'idée de l'arbre de vie, du Christ, de la croix, de l'Eglise, celle de la vie spirituelle et du salut »[1].
De plus, la représentation de l'arbre de Jessé montre un arbre luxuriant sortant de l'abdomen de Jessé (dans les représentations anciennes, Jessé est couché, et l'arbre évoque clairement la généalogie charnelle), avec en général quelques rois de la lignée davidique, puis la Vierge, le Christ et l'Esprit Saint (sous forme d'une ou de sept colombes).
Cette représentation hiérarchisée articule la vie de la grâce (la Vierge enfantant le Christ) sur la vie biologique (la lignée charnelle). Le message est que la société chrétienne n'est pas tant cimentée par les liens du sang mais par la vie de la grâce[2].
Exemples :
Il y a d'autres exemples que celui de la basilique de saint Quentin présenté ci-dessus.
La fresque de Giuseppe Arcimboldi et Giuseppe Meda dans le dôme de Monza (1556) fait une synthèse du thème de l'arbre de Jessé et de la croix comme arbre de vie[3].
Dans la cathédrale de Montréal, un crucifix du XV° a été modifié au XVII° siècle pour former un arbre de Jessé.
Une telle synthèse se justifie parfaitement : l'arbre de vie évoque la vérité de l'Incarnation, et c'est parce que Dieu a véritablement assumé notre humanité que sa douloureuse passion est devenue pour nous l'arbre de vie, vivifiant.
Autres développements...
150 ans plus tard, saint Louis-Marie de Montfort parlera de l'arbre de vie comme symbole de la croix[4] aussi bien que de la Vierge Marie[5].
[1] Anita Gerreau-Jalabert, L'arbre de Jessé et l'ordre chrétien de la parenté, dans Marie, le culte de la Vierge dans la société médiévale, Beauchêne, Paris 1996, p. 138-170, p. 155
[2] Cf. Anita Gerreau-Jalabert, Ibid., p. 138-170
[3] M.G. Balzarini, "Albero di Jesse", Iconografia e arte cristiana, diretto da Liana Castelfranchi, Maria Antonietta Crippa. Edizioni San Paolo, Milano 2004, p. 55-57
[4] Saint L-M de Montfort, Le Secret de Marie § 22
[5] Saint L-M de Montfort, Le Secret de Marie § 70-78
Françoise Breynaert