Dès lors, mes frères, il nous faut veiller avec le plus grand soin à ne pas laisser ce Verbe proféré par la bouche du Père et venu jusqu'à nous en passant par la Vierge, s'en retourner à vide. Par l'entremise de cette même Vierge, rendons grâce pour grâce. Et tant que nous sommes réduits à soupirer vers la présence de la source, que du plus profond de nos cœurs jaillisse le chant du souvenir et que retournent à la source les flots de la grâce, pour n'en revenir que plus abondants encore. D'ailleurs, s'ils ne remontent à leur source, ils tarissent et, infidèles dans les petites choses, nous n'aurons pas droit aux plus grandes récompenses... [...]
Résumons ! Quelle que soit l'offrande que tu te disposes à présenter à Dieu, n'oublie pas de la confier à Marie, afin que la grâce remonte à son donateur par le même canal qui l'a apportée. Dieu, vous le pensez bien, n'était pas embarrassé pour nous infuser la grâce à son gré sans utiliser cet aqueduc, mais il a voulu choisir pour toi ce moyen de transfert. Car peut-être tes mains sont-elles couvertes de sang ou souillées par d'autres présents dont tu n'as pas su te débarrasser.
C'est pourquoi, ce peu de chose que tu désires offrir à Dieu, prends soin de le déposer entre les mains de Marie pour être offert par ces mains très accueillantes et dignes d'être agréées, si tu ne veux pas essuyer un refus. Ces mains, vous le savez, sont comme des lis de la plus pure blancheur. Et le Seigneur qui aime tant les lis (Cant 2, 16) ne se plaindra pas de trouver non entourées de lis des offrandes, quelles qu'elles soient, présentées par les mains de Marie.
Sermon sur la Nativité de Marie « De aquaeductu » (sermon de l'aqueduc) § 13
dans Ecrits sur la Vierge Marie, Mediaspaul, Paris 1995, p. 116-117