Marie est la Virgo offerens, la Vierge qui offre.
Dans l'épisode de la présentation de Jésus au Temple (cf. Lc 2, 22-35),
l'Eglise, guidée par l'Esprit Saint, a entrevu, au-delà de l'accomplissement des lois concernant l'oblation du premier-né (cf. Ex 13, 11-16) et la purification de la Mère (cf. Lv 12, 6-8), un mystère du salut relatif à l'histoire du salut.
Autrement dit, elle a noté la continuité de l'offrande fondamentale que le Verbe incarné fit au Père en entrant dans le monde (cf. He 10, 5-7).
Elle a vu la proclamation de l'universalité du salut, puisque Siméon en saluant dans l'enfant la lumière destinée à éclairer les peuples et la gloire d'Israël (cf. Lc 2, 32), a reconnu en lui le Messie, le Sauveur de tous.
Elle a compris la référence prophétique à la passion du Christ: les paroles de Siméon, unissant dans une même prophétie le Fils « signe de contradiction » (Lc 2, 34) et la Mère dont l'âme serait transpercée par un glaive (cf. Lc 2, 35), trouvèrent leur réalisation sur le calvaire. Mystère de salut, oui, qui sous divers aspects, oriente l'épisode de la Présentation au Temple vers l'événement salvifique de la Croix.
Mais l'Eglise elle-même, surtout à partir du Moyen Age, a entrevu dans le cœur de la Vierge, qui porte son Fils à Jérusalem pour le présenter au Seigneur (cf. Lc 2, 22), une volonté d'oblation, qui dépasse le sens ordinaire du rite qu'elle accomplissait. De cette intuition, nous avons un témoignage dans l'affectueuse interpellation de saint Bernard:
« Offre ton Fils, Vierge , et présente au Seigneur le fruit béni de tes entrailles. Offre pour notre commune réconciliation la victime qui plaît à Dieu » (56)
Cette union de la Mère avec son Fils dans l'œuvre de la rédemption (57) atteint son sommet sur le Calvaire, où le Christ «s'offrit lui-même sans tache à Dieu» (He 9,14) et où Marie se tint auprès de la Croix (cf. Jn 19, 25) « souffrant cruellement avec son Fils unique, associée d'un cœur maternel à son sacrifice, donnant à l'immolation de la victime, née de sa chair, le consentement de son amour » (58) et l'offrant, elle aussi, au Père éternel (59).
Pour perpétuer à travers les siècles le sacrifice de la croix, le divin Sauveur a institué le sacrifice eucharistique, mémorial de sa mort et de sa résurrection, et l'a confié à l'Eglise son épouse (60) celle-ci, surtout le dimanche, convoque les fidèles pour célébrer la Pâque du Seigneur jusqu'à ce qu'il revienne (61).
L'Eglise l'accomplit en communion avec les Saints du ciel et d'abord avec la bienheureuse Vierge (62), dont elle imite la charité ardente et la foi inébranlable.
Notes :
56. In purificatione B. Mariae, Sermo III, 2: PL 183,370; Sancti Bernardi Opera, éd. J. Leclercq-H. Rochais, IV, Romae 1966, p. 342.
57. Cf. Concile Vatican II, Constitution dogmatique sur l'Eglise Lumen Gentium, n. 57: AAS 57 (1965), p. 61.
58. Ibid., n. 58 : AAS 57 (1965), p. 61.
59. Cf. Pie XII, Encyclique Mystici Corporis : AAS 35 (1943), p. 247.
60. Cf. Concile Vatican II, Constitution sur la liturgie Sacrosanctum Concilium, n. 47: AAS 56 (1964), p. 113.
61. Cf. ibid., nn. 102 et 106: AAS 56 (1964), pp. 125 et 126.
62. « ... meminisse dignare omnium eorum, qui a saeculo placuerunt tibi, patrum sanctorum, patriarcharum, prophetarum, apostolorum (...) et sanctae et gloriosae genitricis Dei Mariae et omnium sanctorum (...) meminerint miseriae et paupertatis nostrae, et offerant tibi nobiscum sacrificium hoc tremendum et incruentum » : Anaphora Iacobi fratris Domini syriaca : Prex Eucharistica, éd. A. Hänggi-I. Pahl, Fribourg, Editions Universitaires, 1968, p. 274.
Paul VI, Exhortation Marialis cultus, § 20