Quant au martyre de la Vierge que, s'il vous en souvient, nous avons appelé la douzième étoile de son diadème, il est décrit tant par la prophétie de Siméon que par le récit de la Passion même du Seigneur.
Celui-ci, dit le saint vieillard en parlant de l'Enfant Jésus, est dressé comme un signe attirant sur lui la contradiction, et toi-même, ajoutait-il s'adressant à Marie, un glaive de douleur te transpercera l'âme (Lc 2. 34-35).
Vraiment, ô bienheureuse Mère, ton âme, un glaive l'a transpercée ! Et d'ailleurs ce n'est qu'en la traversant qu'il pénétra dans la chair de ton Fils.
De fait, quand il eut rendu l'esprit, ce Jésus, ton Jésus - il appartient à tous mais à toi spécialement - ce n'est certes pas son âme à lui qu'atteignit la lance cruelle qui (sans pitié pour ce mort auquel elle ne pouvait plus nuire) ouvrit son côté [Jn 19, 34], mais c'est ton âme à toi qu'elle transperça : son âme a Lui, alors n'était plus dans son corps, mais la tienne, certes, n'en pouvait plus être arrachée.
C'est donc bien ton âme que la douleur a pénétrée, au point que, avec raison, nous te proclamons plus que martyre, puisqu'en toi la souffrance corporelle fut surpassée par la douleur de ta compassion.
Saint Bernard, Sermon des Douze étoiles, §14
(Latin : Sermo infra Octavam Assumptionis, 14-15. PL 183, 437)
Ecrits sur la Vierge Marie, Mediaspaul, Paris 1995, p. 35-36